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Page:Rousse - Mirabeau, 1891.djvu/33

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MIRABEAU.

Est-ce dans l’Ami des hommes ou dans un journal d’hier qu’on lit des phrases comme celles-ci : « Le rentier est un oisif qui jouit…. La plupart des maux de la société lui sont dus…. Les grandes fortunes sont dans un État ce que sont les brochets dans un étang…. Je ne connive pas avec les idiots ou les gens de sac et de corde qui prétendent qu’il faut que le peuple soit misérable…. La colère du ciel ne fait magasin que des pleurs du pauvre opprimé…. »

Qui a prononcé, quarante ans avant les conventionnels, ce mot de Fraternité, que nos révolutions et nos haines d’un siècle rendent presque odieux aujourd’hui ? « Je me range devant le porteur d’eau qui passe, parce que le pauvre homme est chargé ; j’accepte le contact d’un mendiant dont l’odeur infecte et les haillons me reprochent une fraternité méconnue !… » Et à propos de la traite des nègres : « Il faut nous fraterniser dans le nouveau monde comme dans l’ancien ».

Et les vues sur le crédit public, encore tout meurtri des expériences de Law et des écueils du Mississipi ; et la théorie du libre-échange disputant aux règlements jaloux de Colbert le marché fermé de la France…. Et les pages superbes sur le défrichement des landes de Gascogne !… sans compter les traits d’esprit, les mots sanglants, les pastiches de La Bruyère ou de Saint-Simon, sur « les gens de plume et d’écritoire faisant place à tous les potirons que la haute faveur élève de toute part ! » Enfin cette apostrophe audacieuse adressée au Roi