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Page:Rousse - Mirabeau, 1891.djvu/43

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MIRABEAU.

marin ait voulu, d’un seul coup et d’avance, payer toute sa dette au tempérament de sa race. « J’étais un fou sérieux, dit-il, pas très doux », et pour compléter en deux mots la confession de ce héros précoce, ajoutons que c’était un ivrogne achevé ! Mais, après quelques bordées orageuses, de lui-même il s’arrêta de boire et se mit au travail avec ardeur. « La prison des gardes de l’étendard avait d’ailleurs mis de l’eau dans son vin. »

À dix-sept ans, il avait terminé ses caravanes sur les galères de son ordre, et il quittait Malte pour reprendre du service sur les vaisseaux du Roi. À vingt et un ans, il était enseigne ; et, depuis cette époque, dans toutes les mers et sous toutes les latitudes, partout où il y avait des coups à donner et à recevoir, il conquit le renom d’excellent officier et de marin intrépide.

Blessé gravement par un boulet dans la désastreuse campagne du Canada et prisonnier des Anglais, capitaine de frégate à trente ans, capitaine de vaisseau trois ans après, en 1752 il était nommé gouverneur de la Guadeloupe et désigné comme gouverneur général des îles Sous-le-Vent. Il était sur la route des grands emplois ; il s’en fallut de très peu qu’il n’y arrivât.

Malade et forcé de rentrer en France, le bailli de Mirabeau avait cédé aux instances du marquis et s’était laissé présenter à la cour. Il débarque à Versailles les mains pleines de projets et de mémoires sur la marine et sur les colonies, croyant qu’il n’au-