Page:Rousseau - Œuvres complètes (éd. Dupont), tome 2, Discours, 1824.djvu/214

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dans le silence ; c’est la reconnaissance que je vous dois des égards avec lesquels vous m’avez combattu. Sur ce point seul je me flatte de ne vous point céder. Vous avez donné aux gens de lettres un exemple digne de vous, et qu’ils imiteront peut-être enfin quand ils connaîtront mieux leurs vrais intérêts. Si la satire et l’injure n’étaient pas aujourd’hui le ton favori de la critique, elle serait plus honorable à ceux qui l’exercent, et plus utile à ceux qui en sont l’objet. On ne craindrait point de s’avilir en y répondant ; on ne songerait qu’à s’éclairer avec une candeur et une estime réciproques ; la vérité serait connue, et personne ne serait offensé ; car c’est moins la vérité qui blesse, que la manière de la dire.

Vous avez eu dans votre lettre trois objets principaux ; d’attaquer les spectacles pris en eux-mêmes ; de montrer que quand la morale pourrait les tolérer, la constitution de Genève ne lui permettrait pas d’en avoir ; de justifier enfin les pasteurs de votre Église sur les sentiments que je leur ai attribués en matière de religion. Je suivrai ces trois objets avec vous, et je m’arrêterai d’abord sur le premier, comme sur celui qui intéresse le plus grand nombre des lecteurs. Malgré l’étendue de la matière, je tâcherai d’être le plus court qu’il me sera possible ; il n’appartient qu’à vous d’être long et d’être lu, et je ne dois pas me flatter d’être aussi heureux en écarts.

Le caractère de votre philosophie, monsieur, est d’être ferme et inexorable dans sa marche. Vos