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Page:Roussel - Locus Solus, 1914.djvu/118

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de sa chevelure, enflant ou diminuant selon que sa tête remuait plus ou moins. L’étrange musique prit bientôt plus de corps et d’intensité ; chaque cheveu vibrait comme une corde instrumentale, et, au moindre mouvement de Faustine, l’ensemble, pareil à quelque harpe éolienne, engendrait, avec une infinie variété, de longues enfilades de sons. Les soyeux fils blonds, suivant leur longueur, émettaient des notes différentes, et le registre s’étendait sur plus de trois octaves.

Au bout d’une demi-heure, le maître, perché sur l’échelle double, aida Faustine, en l’agrippant d’une main par la nuque, à se hisser près de lui sur le haut du récipient afin de redescendre jusqu’au sol.

Canterel, qui avait assisté à toute la séance, examina la splendide crinière musicale et découvrit autour de chaque cheveu une sorte de fourreau aqueux excessivement mince, provenant d’un dépôt subtil occasionné par certains sels chimiques en dissolution dans l’aqua-micans. Violemment électrisée par la présence de ces imperceptibles enveloppes, la tignasse entière s’était mise à vibrer sous le frottement de l’eau brillante, qui — le maître l’avait constaté anté-