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Page:Roussel - Locus Solus, 1914.djvu/136

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habitua patiemment Asnorius à faire lui-même, en s’aidant de son bec, un vaste nœud coulant avec le fil d’or qui lui tenait la patte.

Quand l’obéissante bête sut accomplir ce tour de force, l’esclave, toujours étendu, l’entraîna, durant de multiples séances, à lui ceindre largement la figure avec l’énorme boucle, en la faisant reposer d’une part sur son cou, de l’autre contre le sommet de sa tête ; puis, imitant les divers retournements d’un dormeur, il lui apprit à saisir toute occasion de glisser peu à peu jusque sous sa nuque le dangereux fil d’or, suffisamment grêle pour s’immiscer sans peine entre les cheveux et le coussin. Alexandre, notoirement, avait un sommeil agité, qui, le moment venu, faciliterait la tâche d’Asnorius.

Arrivé à cette phase de l’éducation entreprise, Guzil, agrippant à deux mains son terrible collier pour éviter sa propre strangulation, accoutuma l’oiseau à s’enfuir brusquement dans la direction propice puis à tirer sur le fil en utilisant l’entière vigueur de ses ailes immenses. Étant donné la force exceptionnelle représentée par l’effrayante envergure d’Asnorius, le procédé, mis en pratique, amènerait infailliblement la mort