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Page:Roussel - Locus Solus, 1914.djvu/188

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laquelle il faisait face. L’aide s’éloignait de lui pour aller vers le garçonnet, derrière lequel, pendant la récitation, il était passé non sans décrire humblement, afin de ne rien troubler, une courbe assez prononcée.

Montrant une noble tête d’artiste aux longs cheveux gris, l’homme en blouse, penché sur une feuille de papier entièrement noircie d’encre bien sèche, commença d’y faire apparaître du blanc à l’aide d’un fin grattoir, non sans évincer de temps à autre, avec l’extrémité latérale de son auriculaire, la légère râpure produite.

Peu à peu, sous la lame, qu’il maniait avec une suprême habileté, s’indiqua, blanc sur fond noir, le portrait de face d’un pierrot — ou mieux d’un Gilles, vu tels détails imités de Watteau.

Au milieu de nous, le jeune observateur, appuyant presque son front au vitrage, épiait avec grande attention les subtils agissements de l’artiste, qui prononçait parfois, en riant malgré lui, cette phrase : « Une grosse dito », qu’un troisième œil-de-bœuf, identique aux autres, laissait porter au dehors.

Le travail marcha rapidement, et le Gilles, très poussé comme exécution malgré l’étran-