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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/232

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engrais végétal qui mérite un traité à part ; c’est déjà un engrais tout fait qu’on peut employer tel qu’il est tiré de la terre, à moins qu’il ne soit pyriteux ; & c’est alors le cas de le laisser incinérer à l’air.

Section II.

Des Engrais animaux.

On comprend sous cette dénomination les chairs, le sang, les os, les cornes, les urines, les excrémens, les poils, les laines ; en un mot, tout ce qui a appartenu aux quadrupèdes, aux oiseaux, aux poissons, aux insectes, &c. même les matières que les hommes ont employées à leurs usages. Les teintures, toutes les préparations quelconques n’ont pas été capables de détruire leurs principes, & tout au plus elles les ont altérés. Le nombre des animaux qui vivent sur ou dans la terre d’un champ, est toujours proportionné à celui des plantes à demeure qu’il nourrit, & plus les espèces de plantes sont variées, plus les espèces d’animaux & d’insectes y fourmillent : voilà l’origine de l’engrais que les prairies procurent au sol ; mais il faut y ajouter la décomposition annuelle d’une partie de leurs feuilles, & des substances météoriques qu’elles se sont appropriées. Comme tout est lié dans la nature, comme tous les êtres ont des rapports les uns avec les autres, & qu’ils ne peuvent exister sans ces rapports, il est impossible, dans ce cas, de considérer séparément les dépouilles immenses de ces insectes, & ce que la destruction de leur être rend à la terre. Il n’en est pas moins vrai que ces dépouilles & ces excrémens sont plus multipliés qu’on ne se l’imagine : l’exemple du ver à soie ou de telle autre chenille, en offre une preuve convaincante. Les plantes & les animaux, d’une manière ou d’une autre, concourent donc à former le premier & second engrais naturel ; peut-être doit-on regarder le météorique comme le premier, puisque c’est lui & par lui que les deux autres sont vivifiés : c’est par cette triple combinaison qui se subdivise ensuite à l’infini, que la terre prépare une abondante nourriture aux plantes.

On voit par-là pourquoi un champ inculte devient de plus en plus infertile ; il nourrit peu de plantes, & par conséquent peu d’animaux. Sa superficie durcie ne permet plus aux engrais météoriques de la pénétrer ; la loi d’appropriation est détruite, & s’il se forme sur cette superficie quelque peu de terre végétale, elle est entraînée perpétuellement par le lavage des pluies.

Quelques auteurs ont dit que l’évaporation de l’humidité de la terre pendant les chaleurs, ressembloit à l’opération de la distillation, par laquelle l’eau monte pure, & par conséquent que les principes de la végétation ne pouvoient s’élever avec elle. Je conviens que les principes terreux, & peut-être salins, ne sauroient s’évaporer ; mais les huileux & graisseux, dans leur état savonneux avec l’eau, sont très-susceptibles de se sublimer, puisqu’ils sont dans une atténuation aussi grande que l’eau. D’ailleurs, lorsque l’on distille la lavande, ou telle autre plante qui contient une huile essentielle, cette huile ne monte-t-elle pas avec l’eau ? d’où je conclus que l’évaporation fait perdre à un champ même inculte, les principes volatils