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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/719

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bir l’action de la presse, qu’il n’y restera plus un atome d’huile. Si on veut juger de la quantité d’huile qui reste dans les tourteaux sortis des presses ordinaires, que l’on considère que les moulins de recense de la seule ville de Grasse, retirent par an plus de 2000 rhubs d’huile (le rhub pèse 20 liv.) des seuls marcs que l’on jettoit autrefois[1].

Cette manière de presser l’olive dispenseroit donc, 1°. d’avoir recours aux moulins de recense ; 2°. on diminueroit au moins de moitié, peut-être même des trois quarts, la dépense en bois pour chauffer l’eau que l’on vide dans les cabats après la première presse. Cet objet mérite certainement d’être pris en considération dans le Languedoc & dans la Provence, où le bois est très-cher. Je sais que l’on se sert communément du marc, après qu’on l’a retiré de la presse, pour chauffer l’eau ; mais ce marc, consumé inutilement, serviroit à chauffer ses propriétaires, ou du moins les gens de leur ferme. 3°. Deux hommes seuls dirigeront six opérations à la fois 1°. celle des deux meules ; 2°. celle du premier tordage ; 3°. le battage pour le second tordage ; 4°. le battage pour le troisième tordage ; 5°. l’échaudement de la pâte ; 6°. le battage du retordage. Enfin, ces six opérations seront faites en deux tiers moins de temps que l’ettritage & le pressurage tels qu’on les fait actuellement. Cela paroît difficile à comprendre, mais je m’en rapporte à la décision de ceux qui auront vu, comme moi, les opérations de Languedoc & de Provence, & qui, sans prévention, les auront comparées avec celles de Flandres, & sur-tout, avec celles de Hollande. Si ces vérités étoient moins frappantes, il me seroit facile de les démontrer jusqu’à l’évidence ; mais ce n’est point pour celui qui ne sait pas voir, que j’écris.

On se récriera, sans doute, sur la difficulté de se procurer des meules de sept à neuf pieds de diamètre, sur quinze à dix-huit pouces d’épaisseur, & sur la dépense de cette emplette. Je demande : en reconnoît-on l’avantage ? on ne doit donc pas regarder à la dépense. Si le Hollandois s’en sert pour des graines, à plus forte raison le Languedocien & le Provençal doivent-ils les employer pour un fruit dont le noyau l’emporte par sa dureté, à tous égards, sur celle des graines. Si le moulin de recense, établi près de Bastia en Corse, avoit une meule dont la hauteur fût en proportion de son épaisseur, on ne diroit pas que les noyaux des olives de Corse sont trop durs pour être écrasés, parce que la meule agiroit avec plus d’action sur une moins grande surface, car il est évident que la trop grande surface diminue considérablement l’action de la meule en partageant trop son poids. Il faut donc du poids aux meules, & plus il sera considérable, plus elles seront parfaites. Revenons aux moyens de se procurer des meules, & examinons quelle doit être leur qualité.

Plus le grain d’une meule est serré & compacte, plus la meule pèse, & moins elle s’use promptement. Aussi, un Hollandois qui auroit à faire construire un moulin, par exemple, dans la partie voisine du Pont de Saint-Esprit, & qui n’auroit pas une es-

  1. Voyez la description du moulin de recense à l’article Huile.