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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/566

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peuvent supporter. Quant aux branches-crochets, je les tiens toujours un peu de court, afin d’avoir du fruit en même temps que des branches fructueuses pour la taille subséquente. En les tirant, elles pourroient me donner plus de fruit ; mais elles n’auroient que des branches étiolées pour l’année suivante. Le principe est qu’il faut avoir du bois avant le fruit.

Si cependant l’événement ne répondoit pas à mon attente, je déchargerais amplement mon arbre en l’ébourgeonnant. Le peu de bois que je lui laisserois, ayant toute la sève à lui seul, profiteroit nécessairement. Dans ces commencemens, il pousse toujours une infinité de gourmands. Au moyen de la charge & de l’allongeaient dont je viens de parler, il en a beaucoup moins que suivant la méthode ordinaire. Les jardiniers ont coutume d’alonger le même bois ; il arrive de là qu’il noue fort peu de fruits parce que ces branches foibles & fluettes n’ont pas de récipiens assez vastes pour contenir la sève nécessaire pour le nourrir. Alors, ou les fleurs avortent, ou les fruits noués tombent ; de plus, en taillant court les gros bois, ils poussent avec véhémence ; c’est un fait incontestable. Les ouvriers peu intelligens, arrêtent par les bouts ces branches fortes, & raccourcissent sans cesse les branches folles qu’elles ont poussé de tous les yeux du bas qui se sont ouverts contre l’ordre de la végétation. Cette opération meurtrière, répétée tous les ans, prive le maître du fruit, & bientôt de ses arbres.

Malgré l’essor que je donne au pêcher, il ne laisse pas de produire des gourmands de toutes parts. Je les palisse, & je n’ôte que ceux qui s’entre-nuisent, ou qui sont placés devant, derrière, aux extrémités, & tout au haut de l’arbre. Pour ne point l’épuiser à force de porter des gourmands en pure perte, on taille vers le mois de juin & au commencement de juillet, ceux qui se trouvent nécessaires dans les places où ils sont nés, & on les ravale sur deux ou trois yeux les plus bas, & quelquefois sur un seul. Alors on voit éclore de ces yeux des branches-crochets, qui seront formées encore assez à temps pour donner du fruit l’année suivante.

Quand on appréhende que ces gourmands, ainsi traités, ne prennent trop de force dans le bas, & ne deviennent des branches dominantes, on commence dès la fin de mai à les couper à moitié tout près d’un œil ; à la mi-juin, on les coupe encore plus bas, & au commencement de juillet, on les met à un seul œil. Au moyen de toutes ces plaies sur lesquelles l’air agit, la sève s’évapore, son action se ralentit, & le gourmand est dompté.

Les autres soins qu’il faut prendre de ces jeunes arbres, se réduisent à les fumer quand la terre est maigre, ou qu’ils ont souffert de l’intempérie de la saison, ou des fléaux de l’air, & à leur donner de fréquens labours. Ils sont faciles, & produisent de grands effets aux arbres plantés, comme je l’ai dit, à un pied de distance du mur. On les arrosera durant les sécheresses, & on les buttera afin de les empêcher de jaunir pendant les humidités continues, en battant un peu la terre par-dessus en forme de talus, ou en plaçant