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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/758

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chargeoit les fourneaux bâtis en œuf avec du pin extrêmement fourni de résine, le goudron en couloit bien plus gras : il l’est en effet quelquefois à tel point que, sans autre préparation on peut le vendre pour brai gras, &c. Voici la méthode la plus ordinaire pour faire le brai gras. On fait fondre dans de grandes chaudières du brai sec, avec partie égale de goudron : si le goudron se trouve maigre, il faut augmenter la dose du brai sec ; si au contraire il est fort gras, un tiers de brai sec suffit.

Si j’ai copié ces détails sur le produit des pins, qui tiennent plus aux arts qu’à l’agriculture proprement dite, c’est afin de rassembler dans un même corps d’ouvrage, les objets d’utilité champêtre, & afin que si la lecture de cet Ouvrage inspire quelques seigneurs bienfaisans, à quelques braves & honnêtes curés, & enfin à des zélés patriotes, l’envie d’enrichir de pins les pays pauvres & à landes, ils sachent mettre à profit les productions de ces arbres, & par là couvrir un sol auparavant inutile à l’agriculture ; enfin, augmenter un peu le bien-être des malheureux habitans de ces cantons. Ils seront bien assurés d’une bonne vente des jeunes arbres dans les cantons, dans les provinces voisines où l’on donne des échalas aux vignes.


CHAPITRE VI.

De l’usage des pins en médecine, & pour l’économie champêtre.


Les boutons des pins, avant leur développement, avant qu’ils parviennent à l’état de bourgeons, sont regardés dans le nord comme un excellent anti-scorbutique & anti-pulmonique.

Lorsque l’on veut préparer ces boutons, on en fait bouillir une once avec égale quantité de miel blanc dans une pinte & demie d’eau, jusqu’à réduction d’environ le tiers, & l’on passe ensuite au travers d’un linge sans expression. On ne donne au commencement que trois onces de cette décoction le matin, & autant le soir : si l’estomac ne la rebute pas, ce qui arrive quelquefois, on augmente la dose par degrés jusqu’à ce qu’on puisse en faire prendre quatre verrées de six onces chacune, dans le cours de la journée, pendant trois ou quatre semaines consécutives… ; si l’estomac rebute cette décoction, on la coupe avec autant d’eau, & si, après en avoir fait usage pendant quelques jours, elle continue d’exciter des nausées, on l’abandonne entièrement & l’on a recours aux sucs nouvellement exprimés des plantes anti-scorbutiques.

Aux mots résines, térébenthine, je décrirai leurs propriétés médicinales.

M. Kalm, de l’académie de Stockholm, a donné la description de la manière dont on prépare en Canada une boisson avec le pin.

Ce pin est très-commun en Canada & ressemble beaucoup au nôtre de Suède, excepté que celui d’Amérique à ses pointes beaucoup plus petites. Ce pin est assez rare dans les provinces angloises de l’Amérique septentrionale, parce que cet arbre exige un climat plus froid. Ce sont principalement les françois qui préparent une espèce de bière avec ces pins ; les hollandois se servent également de cette boisson.