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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/256

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articulations, on dira qu’elles sont simplement adaptées les unes sur les autres, & maintenues dans leur à-plomb & dans leur ensemble, par la seule écorce de la tige. En effet, que l’on prenne une tige, on se convaincra qu’elle casse net & avec facilité, par le milieu du nœud ; tandis que le reste du chalumeau se plie & se casse par esquille, & ne cède qu’à la force. Reprenons ; c’est donc une sève plus pure, plus travaillée, qui afflue alors ; il en faut une moins grande quantité. Aussi voit-on les feuilles du bois des tiges, jaunir & se dessécher. Leur abondance & leur existence dévient de jour en jour moins nécessaire, puisqu’elles ont rempli leur tâche ; peu à peu la couleur gagne la tige ; enfin, l’épi mûrit. Il a donc fallu moins de temps pour cette dernière révolution de la sève, parce qu’elle étoit plus pure, plus travaillée, plus nutritive que les précédentes. La sève dans les deux premières révolutions est plus abondante, en raison du plus d’étendue qu’elle doit parcourir & entretenir ; telles sont les feuilles, les tiges. Elle modère son cours avant la fleuraison ; paroît être stationnaire, & elle se raffine, lorsque la fleur se forme & paroît ; il ne lui reste donc plus qu’à créer la fleur. Toutes les autres parties sont dans leur état parfait, & ne demandent que ce qui leur est nécessaire pour leur simple entretien ; mais en même temps, elles épurent les sucs destinés à la fleur, elles les subliment, si on peut s’exprimer ainsi. À quoi serviroit à cette époque, cette sève copieuse qui a sonné les feuilles & les tiges ? Elle étoit grossière, par ce que les feuilles & les tiges sont moins parfaites que la fleur ; & la fleur moins parfaite que la graine, puisqu’elle est le complément de toute l’opération, & la perfection du but de la nature pour la reproduction des êtres. Que l’on considère les herbes, les arbrisseaux, les arbres, au moment de la maturité de leurs fruits ! Sur les uns, la feuille est desséchée, & sur les autres, elle n’a plus de fraîcheur, elle semble épuisée. Chaque partie d’une plante a son but particulier, & ne sert que jusqu’à une certaine époque. La majorité peut être comparée à l’estomac, qui prépare les différens sucs destinés à la circulation & à l’entretien de la vie.

Quant à l’origine du principe odorant des fleurs, il est difficile de le démontrer rigoureusement. Essayons quelques conjectures. Les graines de certaines plantes sont par elles-mêmes odorantes, & beaucoup d’autres ne le sont pas. Les plantes qui naissent des premières, participent plus ou moins de l’odeur de la graine, & quelques unes répandent une odeur très-étrangère à celle de leur graine. Le principe odorant des fleurs est toujours dû à l’huile essentielle (consulter ce mot) qu’elles contiennent, & cette huile est le développement de celui des graines. La rose, dont l’odeur se propage au loin, renferme très-peu d’huile essentielle, puisque des quintaux de feuilles en fournissent à peine un gros. Mais c’est une huile, un principe recteur, exalté & divisé à l’excès, & dont la plus infiniment petite partie est odorante. On sait que du musc, pesé rigoureusement au poids d’un grain, avoit infecté de son odeur toutes le chambres d’un vaste château, dont les portes & les fenêtres étoient restées fermées pendant un an. Pesé de nouveau, il n’avoit pas perdu la cen-