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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/259

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& dont je ne donnerai pas la solution : Il faudroit des années & des années avant d’en avoir fait un examen assez rigoureux pour prononcer. Bornons-nous donc, en général, à parler des arbres de notre pays. Malgré ces doutes, j’oserois presque dire que la nature est une dans sa marche, & que, si elle paroît à nos yeux s’en écarter, c’est que nous prenons des modifications de cette marche, pour ses principes. L’oranger lui-même, arbre étranger à notre climat, & qu’on a naturalisé dans quelques pays des plus méridionaux de l’Europe, éprouve en France le concours des deux sèves, quoique, dit-on, il soit perpétuellement chargé de fleurs & de fruits en Amérique. En France, il fleurit à deux époques très-distinctes. Je n’appelle pas fleurir, avoir quelques fleurs éparses pat-ci par-là. Le terme de la vraie fleuraison est caractérisé par l’abondance des fleurs. S’il est fleuri pendant toute l’année en Amérique, & qu’il le soit à deux époques principales dans notre climat, cette différence doit donc être attribuée à l’influence de notre atmosphère qui le soumet à la loi de nos autres arbres ; cette assertion peut être vraie. Je demande seulement aux cultivateurs américains, les orangers, les citronniers & autres arbres toujours verds & toujours en fleurs, sont-ils susceptibles de recevoir la greffe pendant tous les mois de l’année ? si après un mur examen, ils répondent qu’on peut greffer, la question est décidée. Si l’expérience leur a prouvé qu’il faut attendre telle ou telle époque, & que la greffe ne réussit sûrement qu’a ces époques, il sera démontré que la sève éprouve une stase, un repos quelconque, dès lors un renouvellement. Les arbres toujours verds dans nos climats, tel que le sapin, le pin, &c. ont un repos bien marqué & deux sèves distinctes. Ceux qui en retirent les poix, les résines, ne s’y trompent pas. Tout porte à préjuger que le renouvellement de la sève existe en Amérique comme en Europe, & que cette sève y est double. Si quelques cultivateurs américains lisent cet article, je les prie avec instance de vérifier ces faits avec beaucoup d’exactitude, & d’avoir la bonté de me communiquer le résultat de leurs observations.

Il seroit possible, par des analyses chimiques des principes constituans de la sève, & de leurs combinaisons, de démontrer les causes de la seconde sève ou sève du mois d’août ; parce qu’il n’y a jamais dans la nature, action sans réaction. D’ailleurs, on voit une analogie frappante entre le renouvellement du mouvement intestin des liqueurs fermentées (même dans les meilleures caves) & entre celui des deux Sèves. Quels sont les principes constituans de ces liqueurs ? les mêmes que ceux de la sève ; mais triturés & perfectionnés par la fermentation qui leur a fait éprouver de nouvelles combinaisons, & leur a donné une nouvelle manière d’être. Le mois d’août, quoique dans le climat de Lyon & des provinces méridionales, est ordinairement moins chaud que celui de juillet. En août, les jours sont plus courts, les nuits sont plus fraîches. Pourquoi le vin travaille-t-il donc moins en juillet, que dans le mois suivant, quoique sa chaleur soit moins forte ? c’est que