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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/262

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assimilation, parce qu’à mesure que les pleurs de la vigne cessent, le bouton grossit, absorbe l’air atmosphérique, & cet air, ainsi qu’il a été dit, est le grand combinateur des principes. Les premiers progrès de la végétation ne doivent donc pas être uniquement attribués à la première eau sublimée, & qui a pénétré dans l’arbre par la route ordinaire ; elle est trop crue ; l’arbre n’a pas encore les moyens de la préparer au point de se l’approprier ; mais son rôle est assez important, elle va dissoudre & le combiner les anciens matériaux de la sève disséminés dans tous les couloirs des racines & de l’arbre entier. C’est donc de cette ancienne sève nouvellement délayée & dissoute, c’est par son secours que l’arbre va se charger de feuilles & de fleurs. C’est par elle que les racines vont développer leurs mamelons, prêts à se changer en radicules.

La chaleur augmente, l’arbre est paré de sa verdure & de ses fleurs ; es bourgeons se développent, leurs feuilles élaborent la sève, les racines anciennes pompent de nouveaux matériaux, le mouvement ascendant & descendant se perfectionne ; enfin la sève établit son équilibre entre les branches & les racines, & le fruit du cerisier mûrit. Tout ce travail est du à l’ancienne sève, un peu augmentée de la sève nouvelle pompée par les anciennes racines, & qui sert à délayer la première. C’est ainsi que l’arbre travaille jusqu’au renouvellement de la sève du mois d’août. Depuis le premier printems jusqu’au mois d’août, quel rôle jouent donc les nouvelles racines ou radicules poussées successivement en une quantité si considérable, qu’elle correspond au nombre des feuilles ? Si on examine ces nouvelles racines, on les trouvera blanches, tendres, sans consistance & presque pâteuses. Ce sont des enfans à la mamelle qui absorbent beaucoup de sucs, qui ne travaillent encore qu’à leur nourriture & à leur accroissement ; que l’arbre nourrit plutôt qu’elles le nourrissent. Le moment n’est pas encore venu de lui payer un tribut de reconnoissance & de lui être utile. Il faut que ces racines parviennent à l’état de puberté, c’est-à-dire que leur écorce ait pris sa couleur naturelle, que leur charpente soit ligneuse, solide, enfin qu’elles ne travaillent plus, uniquement pour elles.

Quel grand phénomène se présente ! on diroit que la sève est épuisée ; le bouton terminal de la plupart des bourgeons est sans feuille, il est presque aussi aouté que le seroit son semblable lors de la chute des feuilles. Tant que la fougue de la première sève a duré, les bourgeons ont poussé avec force ; ils sont presque aussi gros vers le point de leur naissance que vers leur sommet ; ils ne poussent plus & passent de l’état tendre à l’état dur ; leur couleur verte se métamorphose insensiblement en couleur brune ou jaunâtre, suivant la nature de l’arbre ; enfin un repos réel, uns vraie stase s’établit dans toutes les parties de l’arbre ; la végétation cesse pour ainsi dire[1]. Elle cesse en effet, afin

  1. Quelques arbres paroissent faire exception à cette loi, sur tout certains arbres toujours verds, la même loi existe pour eux, mais à des époques différentes.