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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/381

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partie qui se régénère & qui soit capable de remplir le vuide. Elle est à l’arbre, ce que la peau est à la chair de l’homme & des animaux ; c’est la seule qui se régénère. Le creux ou vuide est aussitôt bouché avec l’onguent de Saint-Fiacre. Les chicots & onglets doivent leur origine à la mauvaise coupe & à l’ignorance du jardinier. Les chancres sont très-multjpliés sur les arbres a noyaux, & ils y sont occasionnés, sur-tout, par le séjour de la gomme. Ce n’est qu’a la longue que les onglets & les chicots produisent la pourriture du bois intérieur ; & ils la produisent infailliblement, si on les conserve pendant deux ou trois ans.

Le jardinier arrive progressivement d’une des extrémités de l’arbre jusqu’au milieu ; & il sait que cette partie du milieu, quoique vuide dans le moment, se garnira assez par la poussée des nouveaux bourgeons. Cependant, si le vuide étoit trop considérable, ce qu’il aura prévu en étudiant son arbre, il détournera quelques bourgeons de l’année précédente, & après les avoir taillés un peu court, ou très-court suivant le besoin, il les inclinera sur un angle convenable contre ce milieu. Plus le bourgeon sera taillé court, & plus, au printems suivant, les jets seront forts & vigoureux. Il répète sur l’autre aile de l’arbre, ce qu’il a fait sur la première, en commençant toujours par l’extrémité. Le grand art consiste à ne pas multiplier le gros bois, & a bien juger de la quantité des bourgeons qui pousseront au printems suivant, afin que lors du palissage, tous puissent être placés convenablement & sans confusion, en ne supprimant que ceux qui poussent sur le devant de la branche ou entre la branche & le mur. Le vrai jardinier sait que chaque branche palissée suivant les règles, doit représenter un arbre entier, c’est-à-dire, que considéré isolément, c’est un arbre en diminutif. Mais cette manière de tailler suppose que le cultivateur connoît les vrais principes de la taille, & sait les modifier & en faire une juste application. Que l’on ne se trompe pas ; sur la multitude d’arbres d’un jardin, deux ne se ressemblent pas au point que leur taille soit la même, quoiqu’ils soient supposés, depuis l’enfante, conduits d’après les mêmes principes. Il faut donc de toute nécessité les modifier suivant le besoin, & la beauté. L’élégance & même la durée d’un arbre, dépendent de la main du jardinier, à moins que des causes extérieures, telles qui les insectes, le ver du hanneton, le taupe-grillon, la grêle, une gelée printanière, un coup de vent, de soleil, &c. ne contrarient ses soins & son savoir.

3. Principes de la taille. Ils sont donc bien difficiles, ces principes, puisque chaque jardinier a les siens, puisque dans chaque province ils varient ? Pas un seul jardinier n’approuve la taille ce son voisin, pas un ne reconnoît un artiste supérieur à lui. À qui faut-il donc en croire ? quelle méthode suivre pour tailler, & quelle est la meilleure ? Si on prenoit la peine d’étudier le grand livre de la nature, on verroit, si on étoit de bonne foi, qu’elle en sait plus que nous, enfin que le chef-d’œuvre de l’art est de l’imiter. Si nous parvenons à connoître d’après quelles lois elle dispose & dirige la végétation de tel ou tel arbre, nous se-