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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/650

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selon qu’il est plus ou moins hâté pour prendre la mesure d’alimens, nécessaire à l’accroissement de chaque âge ».

« Le ver à soie travaille à se dépouiller ou à muer d’abord après la frèze. La révolution qui commence à s’opérer sous sa peau, lui ôte peu-à-peu l’envie & le pouvoir de manger & de marcher. Dès qu’on s’en apperçoit, il faut retrancher la dose des repas, qui ne serviroit qu’a épaissir la litière… Enfin lorsque ses dents ne peuvent plus agir, il cesse tout-à-coup de manger. Ceux qui sont au voisinage du bord des claies ou de quelqu’autre corps ferme & solide, vont s’y établir en quittant, seulement pour un temps, la litière qu’ils regagnent bientôt : ils trouvent dans ces nouvelles places des points plus fixes, pour faire avec avantage les efforts nécessaires à la mue ».

« Tandis que notre insecte conserve encore la liberté des mouvemens, il s’occupe à filer une soie blanche très-déliée, dont il apporte le réservoir en naissant. Ce fil destiné à le garantir des chutes dans sa jeunesse, s’il vivoit sur les arbres dans les champs, lui sert encore dans cette occasion pour l’aider à se dépouiller. Il en attache des brins par-tout aux environs de son corps, pour retenir sa peau en arrière, lorsqu’il se portera lui-même en avant. On juge que les vers à soie sont sains & vigoureux, lorsque la litière est bien garnie de ces fils ».

« Le ver étant amarré de la sorte, sa tête déjà déridée à la frèze, commence à s’enfler ; il la tient élevée & ordinairement immobile comme le reste du corps : elle a quelque peu de transparence, parce que le ver s’est vidé dans les hautes & basses voies, de tout excrément. On apperçoit cette transparence en regardant le ver à travers le jour d’une fenêtre, ou à la lueur d’une lumière ; mais moins distinctement aux deux premières mues qu’aux suivantes. Son museau paroît pointu & plus alongé ; cette partie à laquelle les crochets ou dents, & les yeux qui en terminent la tête, sont attachés, est une écaille faire en calotte, qui tombe séparément de la peau, & renaît comme elle à chaque mue ».

« Cette écaille ne croît pas pendant la durée d’un âge, & elle n’est pas même susceptible d’extension comme la peau : elle s’en détache tout naturellement peu-à-peu, à mesure que celle-ci s’enfle & se détend. Les mouvemens convulsifs dont la tête du ver paroît de temps en temps agitée, achèvent la séparation. La nouvelle enveloppe qui se forme en-dedans, & qui doit avoir plus de volume que la précédente, fait effort pour l’acquérir : elle se fait jour à travers la fente, ou la commissure de l’écaille avec la peau… Comme elle acquiert toujours plus de liberté pour s’étendre, elle pousse en dessous l’ancien museau, & le chasse en avant ; ce qui fait paraître toute la tête pointue & plus alongée. Ce museau ou écaille qui n’est plus qu’un vain masque vide, & qui ne tient presqu’à rien, tombe enfin de lui-même, ou bien le nouvel animal l’arrache, lorsque