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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/375

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avant et après leur cuisson, la différence, à cet égard, ne doive être que peu de chose. D’ailleurs, lorsqu’il s’agit de déterminer positivement si un aliment remplit et nourrit davantage que l’autre, il faut un concours de circonstances, sans lesquelles on ne peut présenter que des données approximatives ; et tous ceux qui se sont hasardés à assurer que cette question étoit facile, ne l’ont pu résoudre.

Cependant, s’il falloit désigner, dans le nombre des faits publiés en faveur de l’intensité de nourriture que fournit l’orge mondé, apprêté comme le riz, je citerois, entr’autres, les expériences de Desmarets, qui s’est convaincu, plus d’une fois, que trois livres suffisoient à la subsistance de trois personnes par jour, sans aucune autre espèce d’aliment, et que la même quantité, réduite en farine, sous forme de bouillie ou de pain, est bien éloignée d’opérer autant d’effet, sur-tout dans les circonstances où le riz est prescrit comme aliment médicamenteux.

Dans tous les cas où le riz est distribué aux troupes, l’orge mondé pourroit également le remplacer, puisque ces deux grains forment à part un aliment qui ne diffère en aucune manière l’un de l’autre. Il seroit possible d’en approvisionner les places fortes où l’on auroit à craindre un siège ou un blocus, et de ne pas recourir à une denrée exotique, souvent fort chère, et qui contracte facilement, dans un lieu peu aéré et humide, l’odeur et le goût de poussière.

Un usage plus fréquent de l’orge mondé diminuera, dans les villes, la consommation du pain, et deviendra, pour les habitans des campagnes, une amélioration sensible dans la qualité de leur aliment principal.

Ce grain ne doit pas moins se conserver, dépouillé en partie de son écorce, comme nous l’avons recommandé, étant exposé à l’air, pour lui faire perdre l’humidité étrangère à sa constitution. Cette partie organique, le germe, qui semble se revivifier au retour du printemps, n’est plus à appréhender dans ses effets ; elle est absolument détruite au moulin. La farine, à la vérité, moins enveloppée dans l’orge mondé, offre plus d’attraits aux insectes ; mais alors il faut renfermer ce grain dans des sacs, les placer éloignés des murs, et dans l’endroit le plus frais du bâtiment.

Mais, dira-t-on, dès que l’orge mondé sera devenu d’une consommation générale, le prix auquel on se propose de le donner ne manquera pas d’augmenter, et alors il se rapprochera de celui du riz : l’expérience prouve absolument tout le contraire. Une denrée quelconque n’est jamais à bon compte dans un pays, qu’autant que l’usage en a fait un besoin journalier, parce qu’alors tous les genres d’industrie se portent sur cet objet, et que la concurrence fait le reste.

Le prix ordinaire de l’orge suit communément le cours des autres grains : quand le blé est à vingt-quatre francs le setier, la même mesure d’orge vaut à peu près la moitié. Voici ce que coûtoient, il y a quelques années, chez les détailleurs de Paris, l’orge et le riz :

liv. sous.
Prix de l’orge mondé, la livre » 5
perlé, idem » 16
en farine, idem 1 5
Prix du riz entier, idem 1 »
en farine, idem 1 4

Or, en supposant que, pour amener ce dernier grain à l’état d’orge mondé, les frais de main-d’œuvre et le déchet soient plus considérables que ceux de la moulure, à raison de la soustraction d’une portion de farine et du temps plus long pour l’opérer, il n’est guères possible d’imaginer que les 25 francs, auxquels le prix du quintal est porté, ne diminuent encore par la suite, lorsque la culture de l’orge aura reçu de l’extension, et que les