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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/43

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la nature et aux moyens de l’art, on leur a donné le nom de farcin volant. Les tumeurs farcineuses n’ont point de siège déterminé, toute la surface du corps y est exposée ; la conjonctive, les tarses, la caroncule lacrymale, la membrane clignotante, même les tendons, les gaines aponévrotiques, les articulations, n’en sont pas exemptes. Cependant, on voit que les parties latérales de l’encolure, les épaules, les côtes, les flancs, les ars, le poitrail et les extrémités en sont plus souvent affectés que le dos, le dessous du ventre, l’anus, le jarret, la membrane du nez.

Les cordes farcineuses suivent assez constamment le trajet des gros vaisseaux veineux, et sur-tout des vaisseaux lymphatiques, dans l’intérieur desquels la matière farcineuse paroit exister ; les étranglemens qui séparent les cordes farcineuses dans les chapelets du farcin, paroissent dus aux valvules de ces vaisseaux.

Farcin grave ou redoutable. Les tuméfactions farcineuses qui sont logées profondément, occasionnent de la douleur, de la fièvre, du dégoût, de la tristesse. C’est à cet enfoncement que sont dus ces engorgemens considérables qui accompagnent ordinairement le farcin des extrémités, des lèvres, des joues, des naseaux et des paupières.

Les tumeurs qui décèlent un farcin redoutable, adhèrent aux chairs, aux tendons et aux aponévroses, aux ligamens, aux cartilages, au périoste, aux os. Ils sont douloureux, ils s’abcédant avec peine, et jamais entièrement ; les ulcères qui en résultent sont calleux, ils fournissent une ample végétation de chairs baveuses, fongueuses, livides, qui se renversent ou se rabattent en forme de champignon : c’est ce qu’on appelle farcin cul-de-poule. D’autres fois, les résultats de cette végétation hâtée sont plus fermes, plus durs, et ont le caractère d’un vrai carcinome. Le pus en est rare ou abondant ; dans le premier cas, il est ordinairement blanchâtre, concret, et, suivant les parties où il se fixe sans avoir d’ouverture, il occasionne des ganglions, des nodus et des ankyloses. Quand il est plus fluide, il est en quelque manière dissous, ichoreux, jaunâtre, verdâtre, sanguinolent ; l’odeur alors en est le plus souvent infecte. Quelquefois il ronge la peau, fait tomber les poils, découvre les muscles, les tendons, les ligamens, les articulations ; attaque les os qu’il carie, et au travers desquels il creuse des sinus, des clapiers ; en un mot il détruit toutes les parties qu’il gagne successivement. Nous l’avons vu pénétrer la substance compacte du canon, détériorer la moelle, et ronger la substance réticulaire de cet os.

Il est d’autres boutons et des cordes de farcin, résultant de tumeurs plus volumineuses, dont le poids est de plusieurs livres. Elles sont plus ou moins enfoncées dans les interstices des muscles, elles occupent ordinairement les glandes sublinguales, maxillaires, parotides, axillaires. On en voit aussi dans les mamelles, dans les testicules, entre les carotides à leur sortie du thorax, etc., etc. Dans tous ces cas, l’induration est plus fréquente que la suppuration, qui est toujours extrêmement tardive, et qui n’a jamais lieu que dans une très-petite portion du centre.

Nous voyons encore qu’un seul bouton comme une seule corde, ouverts ou épanouis, forment dans peu un ulcère qui détruit tout le corps de la peau, et s’étend de manière à occuper tout un membre ; tandis qu’il en est dont les progrès, plus obscurs et plus lents, qui attaquent les parties dures, suscitent des fistules lacrymales, des spina-ventosa, des javards encornés, etc.

Ceux qui se fixent et s’ouvrent par la membrane pituitaire opèrent le plus souvent un changement dans les symptômes ; les boutons disparaissent, et il s’établit, par les naseaux, un écoulement de matière brune, ou du moins de couleur plus obscure que dans la morve. Quelquefois aussi la morve se déclare, et cette métamorphose est presque toujours désavantageuse. Il n’en est pas de même si la larcin, termine la morve : il est quelquefois léger, et nous avons vu des chevaux affectés de la morve, se sauver par cette conversion.

Outre les symptômes relatifs aux tumeurs et aux ulcères, il en est encore d’autres qui pourront faire reconnoître qu’il a un caractère redoutable ; ce sont des œdèmes ou plutôt des indurations carcinomateuses aux paupières, au poitrail, aux muscles abdominaux, aux mamelles, aux testicules, aux jambes ; la lenteur et la foiblesse du pouls, la pâleur de la conjonctive, le terne du poil, la limpidité des urines, l’espèce d’onctuosité qui enduit le derme et qui retient l’étrille, le peu de crasse que cet instrument enlève, etc.

Le farcin a souvent pour symptômes précurseurs, sur-tout dans les chevaux irritables, des lassitudes spontanées, des foiblesses générales, l’insensibilité, des engorgemens œdémateux, le dégoût, la tristesse, l’abattement, la raideur dans les membres et dans le corps, le gonflement de la peau, le hérissement des poils ; le tout accompagné de la toux sèche, de l’ac-