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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/50

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fusain ou bois à lardoire, du saule ou du peuplier. Elles ont la forme d’une petite planchette ou réglette épaisse d’une à deux lignes, large de huit à dix sur une des longueurs ci-dessus désignées, terminée en pointe par un bout, et de l’autre entaillée de manière à former une espèce de fourche carrée dont chaque branche ou fourchon a de trois à quatre lignes de long, ce qui donne la même profondeur à l’entaille. Cette entaille se nomme talon, et quelquefois coche. Le bout opposé, qui se termine en pointe ou angle aigu, ne doit pas cependant être aiguisé de manière à piquer ; cela rendroit l’outil incommode et dangereux. On sent que l’extrémité de cette pointe doit être obtuse ou émoussée. De plus, on évide intérieurement cette même pointe en descendant dans la largeur de l’aiguille. Cette ouverture, faite à jour dans le plein, a depuis deux jusqu’à trois pouces de long. Sa largeur se proportionne à celle de l’aiguille, en laissant aux bords latéraux assez d’épaisseur et de force pour donner à cette partie une solidité suffisante. Cette espèce de châssis, qui termine un des bouts de l’aiguille, est destinée à loger et retenir le fil dont on la charge ; et pour cela, on n’opère pas un évidement complet ; mais on ménage, sur le milieu de la largeur de l’aiguille, entre les deux côtés montans du châssis, une portion de bois que l’on taille et arrondit en forme de brochette. Cette partie se nomme languette. Sa pointe est libre ; c’est-à-dire qu’elle est séparée de la pointe intérieure du châssis par un certain intervalle, et qu’elle ne s’élève qu’environ jusqu’au point où les côtés montans du châssis commencent à faire l’angle et se rapprochent entr’eux pour former la pointe de l’aiguille. Il en est qui ne se réservent pas cette languette sur le bois même de l’aiguille, mais qui font l’évidement complet, et ajoutent, pour servir de languette, une petite broche de fer implantée dans le corps de ladite aiguille. Cette invention s’applique aussi au cas où la languette de bois vient à casser. On voit quelques aiguilles d’une construction plus simple : pour celles-là, on forme, en haut et en bas, deux coches d’une grandeur quelconque, en observant seulement que les deux branches de la coche qui doit faire la tête ou la pointe de l’aiguille, se rapprochent, soit par l’effet de la taille, soit par la flexibilité du bois. Mais cette tête, à double pointe, est incommode dans le travail, et est sujette à accrocher les fils. Pour terminer de suite ce qui concerne l’aiguille, je vais indiquer le mode de la charger, emplir, ou couvrir de fil : ces termes sont synonymes. On prend le bout d’une pelote de fil ou de ficelle, pelote que les laceurs appellent lisseau ; et, tenant l’aiguille dans la main gauche, on passe ce bout à la longueur de deux à trois pouces, par le châssis décrit plus haut : on fait deux tours au pied de la languette, et l’on descend la longue branche de son fil, c’est-à-dire celle qui part du peloton, le long d’une des faces de l’aiguille, afin de l’engager entre les deux cornes ou fourchons du talon : en même temps on retourne face pour face son aiguille dans sa main gauche ; c’est-à-dire qu’en la roulant sous ses doigts, on lui fait présenter son autre côté au fil qu’on conduit de la main droite, et remontant ce fil jusqu’à la languette, on l’y engage de nouveau, mais cette fois par un simple demi-tour ; d’où on le redescend sous le talon, pour le remonter encore et répéter ce mouvement jusqu’à ce que l’aiguille soit assez chargée, ou que l’épaisseur du fil qui la couvre n’excède point l’ouverture des mailles que l’on veut faire, et par lesquelles l’aiguille doit passer. Pour engager facilement le fil par la pointe de la languette, on presse légèrement ce petit morceau de bois qui est flexible, avec le pouce ou le second