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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/572

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leurs fruits commence en juin, et dure plusieurs mois : les Espagnols mangent avec plaisir les citrouilles, avant qu’elles ne soient parvenues à leur degré de maturité.

Telle est la culture qu’on donne non seulement aux citrouilles, mais aussi à toutes les espèces de cucurbitacées.

Les cultivateurs ont en général soin d’alterner les récoltes, c’est-à-dire qu’ils ne font pas produire au même terrain la même plante deux fois de suite. Ils remplacent ordinairement les plantes dont les tiges et les racines occupent peu d’espace, telles que les laitues, les ognons, les haricots, par celles dont la fane ou les racines prennent une certaine étendue, comme sont les cucurbitacées, le maïs, etc. Cette méthode est fondée sur une théorie mieux raisonnée que ne l’est celle qu’on a établie sur la facilité de tracer ou de pivoter, qui appartient à certaines plantes.

ils s’attachent principalement à bien travailler et à bien fumer la terre, pour en obtenir des récoltes abondantes. Sancto stiescol hace estas cosas. Saint fumier produit ces merveilles, me répétoit souvent un cultivateur, lorsque je lui exprimois mon étonnement, à la vue de la brillante végétation des navazos.

Les cultivateurs de San-Lucar de Barameda, qui sont très-industrieux et très-actifs, ne laissent perdre aucune des substances propres à donner de l’engrais. Ils ramassent avec soin les ordures des rues, et les débris de végétaux. Ils répandent sur les champs tout le fumier qu’ils peuvent se procurer. Ils préfèrent celui des chevaux, et celui des mules, aux engrais produits par les bêtes à cornes, par la raison que les premiers sont nourris avec des grains, tandis que les bœufs n’en mangent que très-rarement. On sait, en effet, que les bestiaux qui reçoivent des alimens succulens, produisent un engrais plus actif.

Un terrain aussi facile à remuer que celui des navazos, exige un très-petit nombre d’instrumens. Les seuls dont on fait usage sont le hoyau P à fer plein, dont j’ai donné la description, et l’almografe Q, apporté en Espagne par les Arabes, et extrêmement bien combiné pour l’usage auquel on le destine, c’est-à-dire pour arracher les herbes parasites, et même les plantes cultivées. Cet instrument en fer décrit une forme demi-circulaire ; il a une grosseur égale, et un peu aplatie dans toute sa longueur, excepté à son extrémité, où il forme un fer de lance un peu recourbé. C’est cette extrémité qui sert à arracher les plantes. Il est emmanché comme une faucille. L’ouvrier fait agir l’instrument de la main droite, et se sert au besoin de la main gauche, pour finir de déraciner les plantes, et pour secouer la terre adhérente à leurs racines. De cette manière, le travail peut s’exécuter avec exactitude et avec célérité. On fait usage en outre de cordeaux, et on se sert de paniers pour le transport du fumier, ou celui des sables. La brouette, qui n’est pas connue à San-Lucar, pourroit être substituée avec beaucoup d’avantage, sur-tout lorsqu’il s’agit de former des navazos ; il suffiroit de mettre des planches aux endroits par où elle doit passer. Au lieu de se servir de cet instrument, l’ouvrier transporte le sable dans des paniers posés sur sa tête.

J’ai dit que les navazos seroient submergés par les eaux durant l’hiver, si le cultivateur n’avoit pas des moyens pour procurer leur écoulement. Une trop grande quantité d’eau qui, faute d’écoulement, séjourne un certain espace de temps sur le terrain, en rendroit la culture moins facile et moins lucrative. Il est cependant nécessaire de tenir les fosses remplies d’eau à une certaine hauteur durant l’hiver, afin que le sol soit bien imbibé. C’est pour cette raison qu’on doit ouvrir ou fermer les conduits de décharge selon que l’affluence des eaux est plus ou moins grande. On les ferme lorsque l’eau est au dessous de quatre décimètres dans les fossés, et on les ouvre toutes les fois qu’elle surpasse cette élévation. Les navazos situés immédiatement sur les bords du Guadalquivir, demandent une surveillance plus active. Les hautes marées jettent des sables qui souvent obstruent les conduits ; et même elles portent leurs eaux salées jusque dans l’intérieur des navazos. Les cultivateurs doivent même, pendant la nuit, déboucher les conduits pour