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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/579

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SEMIS, (Jardinage pratique.) Les semis sont la voie de multiplication la plus naturelle, l’unique pour les plantes annuelles, celle qui procure une multiplication plus abondante, qui fournit des sujets plus vigoureux, de la plus belle venue et de plus longue durée ; elle donne des variétés dont quelques unes ont des qualités perfectionnées et des propriétés plus éminentes que celles des espèces auxquelles elles doivent leur existence ; elle procure enfin des races qui s’acclimatent plus aisément au sol et au climat sous lequel elles sont nées, que les pieds en nature transportés de leur pays natal. Sous tous les rapports, cette voie de multiplication doit être préférée pour la propagation des espèces, et pour l’obtention de nouvelles variétés.

Préparation des graines. Les enveloppes interposant un corps étranger entre les semences et la terre dans laquelle les jeunes plants doivent prendre racine, et dont ils doivent tirer une partie de leur substance, il est utile de les en dépouiller ; on doit donc séparer les semences des capsules, bâles, calices, gousses, siliques, baies, pommes, brou, cornes dont elles sont enveloppées. Cette opération doit se faire à peu de distance de l’époque des semis, parce que ces diverses enveloppes servent à la conservation des graines.

Pour accélérer la germination des graines dont l’enveloppe des lobes a une certaine consistance, comme les pois, les haricots, les fèves, etc., on doit les faire tremper dans l’eau ordinaire pendant douze, quinze et vingt heures. La peau des semences s’amollit, les germes se renflent, et, semées dans une terre fraîche, leur plumule se développe bientôt au dehors en même temps que leur radicule s’enfonce en terre ; cette prompte germination assure la réussite des semis, parce que les graines restent moins long-temps exposées à la voracité des insectes, des oiseaux et des musaraignes.

Lorsque des semences ont leur enveloppe très-dure ou qu’elles ont été récoltées sous des climats chauds, telles que différentes espèces de mimosa, de guilandina, de glycine, et autres à coques dures, on doit les plonger dans l’eau dont la chaleur peut être portée depuis vingt degrés jusqu’à quarante-cinq, sans inconvénient pour la vitalité des germes ; mais il est bon que cette chaleur leur soit donnée graduellement ; elle dilate le tissu des coques, imbibe et fait grossir les germes et accélère la végétation des semences, qui, semées sans cette préparation, pourroient rester sous terre deux et même cinq ans sans lever.

Si des semences sont viciées de nielle ou carie, telles que celles des plantes céréales, on doit les passer dans une lessive composée de chaux vive et de cendre. On les y baigne à plusieurs reprises pour que toutes leurs parties en soient imprégnées, et que le virus de la maladie soit détruit. Cette opération, faite peu de jours avant les semis, fait renfler les graines, et les dispose à lever plus promptement.

On soumet à l’immersion dans l’acide muriatique oxigéné, celles dont les enveloppes sont très-dures, d’une substance boiseuse et cornée, telles que celles des erythrina, des ilex et de quelques palmiers, etc. On prétend aussi que cette liqueur est propre à développer les germes dans les semences surannées qui paroissent avoir perdu leurs propriétés germinatives.

On fêle les noyaux des graines dont l’enveloppe est épaisse, ligneuse et très-dure, tels que les noyaux de pêches, de quelques espères d’abricots, de prunes, d’amandiers et autres de cette nature ; mais cette pratique n’est pas sans inconvénient. Il faut employer beaucoup de précautions pour ne pas endommager les amandes, et l’on y parvient rarement ; de plus, les lobes des semences passant subitement d’une grande sécheresse à une humidité considérable, peuvent en être affectés d’une manière défavorable. Il faut faire usage de ce moyen avec modération, et lorsqu’il est possible de varier les chances, employer des procédés moins équivoques.

La stratification se pratique pour toutes les semences qui perdent leurs propriétés germinatives promptement, comme celles des plantes des familles des rubiacées, des myrtes, des lauriers, et pour beaucoup d’autres graines de plantes dont on veut hâter la germination. On l’emploie aussi pour assurer la conservation des graines qui pourroient s’avarier par un long séjour, hors de terre, telles que celles du thé, de quelques ombellifères.

Cette opération consiste à placer, lit par lit, dans du sable ou avec de la terre, et dans des vases, les graines qu’on veut conserver. La terre ou le sable qu’on emploie dans cette circonstance ne doit être ni trop sec. ni trop humide ; trop sec, il absorberoit l’humidité des graines ; trop humide, il les feroit pourrir ou exciteroit leur germination à une époque peu favorable à la végétation du jeune plant. La stratification s’opère peu de temps après la maturité des semences, et les vases qui les renferment doivent être placés à l’abri de la pluie et des fortes gelées. Au premier printemps, les