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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/584

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être placés bien horizontalement les uns à côté des autres, et arrosés, ou plutôt bassinés avec un arrosoir à pomme, à trous très-fins : on passe rapidement l’arrosoir sur les pots, de manière à produire une pluie très-fine qui imbibe la terre sans la battre ou la faire couler hors du pot, et l’on répète cette opération trois ou quatre fois dans la journée des cinq au six premiers jours qu’ont été faits les semis.

Lorsqu’on a semé une suffisante quantité de pots pour garnir une couche, un châssis ou une bâche, ou les y plante sans retardement, et avec les précautions qui seront détaillées ci-après.

Sur couche sourde. La couche sourde s’établit dans une fosse de trois pieds de profondeur sur quatre à cinq de largeur, et sur une longueur déterminée par le besoin : on la construit en toutes sortes de matières fermentescibles, telles que des tontures de buis, d’ifs, du marc de raisin, de pommes et d’olives, de tannée et de diverses sortes de fumiers, ou tout simplement de balayures de chantiers, de bois, ou de rues. Il convient de mélanger les substances de manière à ce que cette couche ne produise qu’une foible chaleur, mais durable.

On la recouvre d’environ sept pouces de terreau de couche qui s’élève au dessus du niveau du terrain ; c’est dans ce lit de terreau qu’on enterre les pots de semis nouvellement faits : on les y place bien horizontalement les uns à côté des autres, et l’on remplit très-exactement, avec du terreau, les intervalles qui se trouvent entr’eux. Dans le climat de Paris et de ses environs, cette espèce de couche convient à la culture des semis de plantes du midi de la France, de l’Italie et de l’Espagne.

Sur couche chaude. La couche chaude se distingue de la précédente, en ce qu’elle est construite avec du fumier lourd et de litière, et qu’elle est établie sur la surface du sol, et non en terre.

On donne le plus ordinairement à cette sorte de couche cinq pieds de large sur trois et demi de haut, sur une longueur à volonté. Ses bords sont formés avec des bourrelets de fumier moelleux, mêlé avec les deux tiers environ de litière triturée. La partie du milieu est formée, lit par lit, des mêmes substances, auxquelles ou ajoute du fumier à demi-consommé. Chaque lit qu’on établit, et auquel on donne de huit à dix pouces d’épaisseur, doit être affermi par un piétinement répété à chaque lit que l’on forme. Lorsque la couche est arrivée à sa hauteur, on la règle, c’est-à-dire, qu’après l’avoir marchée à plusieurs reprises dans toute son étendue, on remplit avec du fumier lourd les endroits bas qui s’y trouvent. Si le fumier qu’on a employé dans la fabrication de la couche n’étoit pas assez humide pour entrer prochainement en fermentation, ou qu’on eût besoin d’une plus vive chaleur que celle qu’on peut espérer du fumier, on l’arrose abondamment ; un seau d’eau par pied carré versé à sa surface suffit à peine pour imbiber la masse de la couche ; après qu’elle a été ainsi arrosée, on la laisse reposer douze ou quinze heures ; alors elle entre en fermentation, et fournit une chaleur très-vive, dont le centre du foyer se trouve dans le milieu de toute sa longueur : on marche de nouveau sur la couche qui s’affaisse sensiblement ; on l’égalise de nouveau avec du fumier lourd dans les endroits qui ont besoin d’être rehaussés, et on la tient un peu bombée dans son milieu.

Cette opération faite, on terreaute la couche, c’est-à-dire qu’on la couvre de terreau dans toute sa surface ; on l’y étend sur une épaisseur d’environ six pouces, et on la garnit sur le-champ de semis dont elle doit protéger et activer la germination.

Quelques personnes attendent quelques jours après la confection de cette sorte de couche, pour y planter leurs pots de semis, dans la crainte que la trop vive chaleur de son premier feu n’échaude les graines, et qu’elles ne lèvent point. Cette crainte est timorée et n’aboutit qu’à faire perdre une chaleur précieuse qui, dirigée sur des semences qui sont à très-peu de distance de la surface, n’en peuvent être maltraitées, et convient au contraire à leur prompte germination. La preuve s’en tire tout naturellement de la grande quantité de plantes et graines adventives qui se trouvent contenues dans le terreau qui recouvre la couche, et qui, malgré qu’elles soient beaucoup plus exposées à la chaleur de la couche que celles semées dans les vases, n’en lèvent pas moins abondamment.

Mais une précaution nécessaire et même indispensable, est d’arroser souvent, et en forme de pluie fine, les pots de semis nouvellement plantés sur la couche ; de les tenir dans une humidité constante, et cela jusqu’à l’époque où les germes soient sortis de terre ; alors, on modère les arrosemens et on ne les administre que lorsque les plantes l’exigent. La chaleur et l’humidité sont les deux principaux moteurs de la germination des graines.

On emploie avec succès, dans notre climat,