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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/616

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effet, il n’est pas d’une assez longue durée et il ne varie pas suffisamment les objets de sa culture.

Aussi je crois que celui proposé par Pictet est préférable pour la plus grande partie de la France. Voici sa rotation :

1o. Productions de jardinage, fumées et sarclées deux fois ; 2o. blé, puis sarrasin et turneps ; 3o. vesces ou raves parquées et consommées sur place ; 4o. blé ; 5o. trèfle ; 6o. blé, puis sarrasin ou raves.

Cet assolement donne huit récoltes en six ans, dont trois de froment. Il maintient la terre parfaitement nette et bien fumée, et cependant sur ces six ans on ne voiture du fumier qu’une fois, on ne donne de forts sarclages qu’une année. Que d’avantages réunis ! Partisans des jachères, pouvez-vous répondre à un pareil argument ?

Le même auteur propose encore, pour les parties les plus méridionales de la France, les assolemens suivans, savoir : 1o. Blé, puis lupins enterrés à la charrue pour engrais ; 2o. blé, puis raves, lin pour fourrage, ou lupinelle, ou trèfle annuel ; 3o. maïs, millet ou sorgho, ou bien : 1o. blé, puis haricots et maïs ; 2o. blé, puis lupins enterrés pour engrais ; 3o. blé, puis raves ou lunpinelle, ou lin pour fourrage ; 4o. maïs, millet ou sorgho.

Les assolemens qui donnent cinq récoltes en trois ans, ou sept en quatre, sont pratiqués dans presque toute la vallée du Pô et ans le pays Vénitien, avec quelques modifications locales, comme cela doit être, et j’en ai été enthousiasmé ; je les avois vu aussi employer dans quelques parties de l’Espagne ; car il ne faut pas croire, comme on le répète dans tous les livres, que l’agriculture soit négligée dans ce royaume ; j’ai fait voir le contraire dans mes notes sur ce pays, imprimées dans le Magasin Encyclopédique de Millin.

Les lupins, si estimés des anciens, sont un excellent engrais, et il en est de même de toutes les plantes un peu aqueuses qu’on enterre avant leur maturité, comme je l’ai déjà observé. Si les cultivateurs des pays chauds connoissoient tout le parti qu’ils en peuvent tirer, leur agriculture prendroit généralement un caractère qu’elle n’a encore que dans quelques cantons privilégiés.

Aux plantes ci-dessus dénommées, on peut ajouter la spergule ou spargoute et les pois pour les pays froids ; les lentilles, le fenu-grec et l’ers pour les pays chauds, et plusieurs autres plantes moins communément cultivées, telles que le cytise, le plantain, la bistorte, le mélilot, l’ortie, le genêt épineux ou ajonc, le genêt d’Espagne ou spartium, etc., etc.

Dans ce qui vient d’être dit, il n’est pas question de prairies artificielles, et ce sont cependant d’elles qu’un domaine peut tenir les avantages les plus certains et les plus durables ; il paroît que les Anglais pensent que les fourrages de plantes annuelles sont plus productifs, et ils peuvent avoir raison dans leur climat froid et humide ; mais dans le nôtre, ils sont trop exposés à manquer par l’effet des gelées du printemps, des trop grandes pluies et des sécheresses prolongées. En conséquence, nous devons préférer les premières. Les deux plantes qui entrent le plus fréquemment sous ce rapport, dans notre agriculture, sont la luzerne et le sainfoin ; la première pour les sols un peu frais, et le second pour les plus secs.

Nous avons vu, observe Pictet, que la culture bien entendue du trèfle convertit en terres à froment celles que la nature n’avoit pas destinées à en produire. Les luzernes en préparent aussi de belles récoltes ; mais on peut dire que l’effet des sainfoins est encore plus marqué, probablement parce qu’il a ordinairement lieu sur des terrains naturellement plus stériles. On peut regarder, ajoute-t-il, l’établissement des prairies en luzerne et en sainfoin, comme un prêt dont la terre paie d’abord un gros intérêt en fourrage, et rend ensuite plusieurs fois le capital en grains. Voici l’assolement qu’il propose pour treize ans, et qui paroît fondé sur d’excellentes bases : les huit premières années, luzerne ou sainfoin ; neuvième, blé et raves ; dixième, pommes de terre fumées et sarclées, ou vesce pour fourrages ; onzième, blé ; douzième, trèfle ; treizième, blé.

Outre ces deux plantes, on peut encore employer la pimprenelle dont les avantages sont si marqués, sur-tout en ce qu’elle fournit un pâturage vert pendant tout l’hiver.

Des assolemens des terres argileuses. Les terres argileuses, comme tout le monde le sait, retiennent les eaux des pluies de l’hiver, et ne se labourent qu’avec la plus grande difficulté. Outre que leur culture est nécessairement plus coûteuse, elles ne comportent pas un aussi grand nombre de productions que les sols légers. La rave et le trèfle, si utiles dans ces derniers, n’y réussissent que très-médiocrement.

Les plantes que l’on peut employer avec le