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Page:Rutebeuf - Oeuvres complètes, recueillies par Jubinal, tome I, 1839.djvu/214

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LI DIZ DES CORDELIERS.

Quant vint filz dame à point, ne soffri point le poindre,
M. a âme desjoint dont ève la fit joindre.

Eve en esté va, et en yver par glace[1],
Nus piez por sa viande qu’elle quiert et porchace.
Isi font li Menor, Diex gart que vent ne glace,
Qui ne chiée empéchié qui ne faille à sa grâce.

Cest roons en O a emmi une espasse[2],
Et roons est li cors ; dedenz a une place ;
Trésor y a : c’est l’âme, que li maufez menace.
O gart le cors et l’âme, maufez mal ne li face !

Devant l’espicerie vendent de lor espices[3],
Ce sont saintes paroles en coi il n’a nul vices :
Tote lor a fet tort, et teles au pélices
Les ont ci pesciez qu’entrer n’osent ès lices.

La béasse qui cloche la cloiche dou clochier[4]

  1. Il y a dans ces strophes plusieurs jeux de mots sur le mot ève pris dans ses diverses acceptions, savoir : Ève, notre première parente, ève, eau du baptême, et ève, eau courante.
  2. Comme cette strophe est assez bizarre et difficile à entendre, je crois devoir donner la traduction des trois premiers vers ; la voici : « Ce rond, qui est fait en O, a au milieu un espace ; le rond c’est le corps ; dedans il y a une place où est un trésor, et ce trésor c’est l’âme, que le démon menace. »
  3. Je ne sais si ce vers est pris au propre ou au figuré. J’ai cherché dans les histoires de Paris s’il n’y avait pas quelque couvent de Cordeliers situé devant l’espicerie, et s’il y avait une espicerie comme il y avait une draperie, mais je n’ai rien rencontré de satisfaisant.
  4. J’avoue franchement que je ne sais pas à quelle querelle des Cordeliers, à quelle circonstance de leur histoire les strophes qui suivent peuvent faire allusion. Ni l’Histoire des ordres monastiques, ni Sauval, ni Félibien, ni les autres écrivains que j’ai été à même de consulter ne m’ont là-dessus fourni