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Page:Rutebeuf - Oeuvres complètes, recueillies par Jubinal, tome I, 1839.djvu/245

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Plus matin que je ne soloie,
Que ne lief pas volentiers main[1].
Si vi Charlot enmi ma voie,
Qui le barbier tint par la main,
Et bien monstroient toute voie
Qu’il n’èrent pas cousin germain.

Il se disoient vilonie
Et si getoient gas de voir[2] :
— « Charlot, tu vas en compaignie
Por crestienté decevoir ;
C’est trahison et félonie,
Ce puet chascuns apercevoir.
La teue loi soit la honie :
Tu n’en as point, au dire voir. »

— « Barbier, foi que doit la baulive
Où vous avez vostre repaire,
Vous avez une goute vive ;
Jamès n’ert jor qu’il ne vous paire.
Saint Ladres a rompu la trive,
Si vous a feru el viaire ;
Por ce que cist maus vous eschive
Ne requerrez mès saintuaire. »

— « Charlot, foi que doi sainte Jame,
Vous avez ouan fame prise :
Est-ce selonc la loi esclame
Que Kayfas vous a aprise ?

  1. Lief, lève. Main, matin ; manè.
  2. Gas de voir, raillerie pleines de vérités.