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Page:Rutebeuf - Oeuvres complètes, recueillies par Jubinal, tome I, 1839.djvu/389

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thèque du Roi, une édition gothique, sans date, contenue dans un volume qui renferme divers ouvrages[1].

On a encore de Jean de Paris un écrit imprimé à Londres en 1686, in-8o, chez J. Cailloue, et qui a pour titre : Determinatio de modo existendi corpus Christi in sacramento altaris, alio quam sit ille quem tenet Ecclesia ; nunc primum edita, cum præfatione historicâ de dogmate transubstantiationis, à Petro Allix. Ce n’est autre chose que la déclaration de son sentiment qu’il donna en 1304 dans l’assemblée des docteurs. Voici comment l’abbé Fleury, dans son Histoire de l’Église rend compte de cette affaire : « En 1304 Jean de Paris, docteur en théologie, de l’ordre des Frères-Prêcheurs, homme d’un grand savoir et d’un bel esprit, voulut introduire une nouvelle manière d’expliquer l’existence du corps de Jésus-Christ dans l’Eucharistie, disant qu’il pouvait y être non-seulement par le changement de la substance du pain au corps de Jésus-Christ, qui fait partie de la nature humaine suivant l’opinion commune des docteurs, mais qu’il était encore possible que Jésus-Christ prît la substance du pain ; et que cette explication était plus populaire et peut-être plus raisonnable et plus véritable, comme sauvant mieux l’apparence des espèces sensibles qui demeurent. Les autres docteurs soutenaient l’opinion

  1. Ce traité ne laisse pas que d’être curieux à plusieurs titres. D’abord il fut composé à l’occasion du différend de Boniface VIII et de Philippe-le-Bel ; ensuite il contient des choses assez hardies pour l’époque : par exemple, l’auteur avance que sur la question de la puissance spirituelle et temporelle il y a des erreurs opposées. La première est celle des Vaudois, qui prétendent que les ecclésiastiques ne peuvent avoir aucun domaine ni bien temporel ; l’autre, qui est une suite de celle d’Hérode, qui s’imagina que Jésus-Christ était né pour être le roi de la terre, est le sentiment de ceux qui croient que le pape, en tant que pape, a un pouvoir sur le temporel au-dessus de celui des rois. L’opinion véritable, qui est entre ces deux erreurs, est que les successeurs des apôtres peuvent avoir des domaines et des biens temporels par la permission et concession des princes, mais qu’ils ne leur appartiennent pas en tant que vicaires de Jésus-Christ et successeurs des apôtres. Il va plus loin : selon lui le pape peut bien excommunier un roi hérétique et le frapper des censures ecclésiastiques, mais non pas le déposer, chose à laquelle les papes tenaient surtout. Quant à eux, ils peuvent être jugés et être déposés. Doit-on s’étonner après cela que le livre de Jean de Paris ait été condamné ? Je ne m’étonne que d’une chose, c’est que l’auteur n’ait pas été condamné au feu avec son livre.