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Page:Sacher-Masoch - La Czarine noire et autres contes sur la flagellation, 1907.djvu/132

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L’AMOUR CRUEL

— En cela tu fais bien, s’écria la reine, en hochant la tête avec approbation. Aussi bien aurais-tu peu de raison de te laisser intimider par moi. Je te veux du bien, beaucoup de bien. Je t’aime comme une amie, comme une mère.

Le page s’était approché et agenouillé devant la reine qui, d’un geste tendre, releva les boucles de son front.

— Dorénavant, Sparte, tu te tiendras souvent autour de moi. Ta présence me fait du bien. J’ai été bien souvent trahie, mais, à toi, je me confierai sans hésitation. Je crains seulement que tu ne sois trop jeune pour bien me comprendre. As-tu étudié Platon, mon petit philosophe ?

— Non, majesté, répondit le page en baissant les yeux.

— Oui, oui. Les jeunes gens ne veulent rien connaître de sa sagesse. Ce n’est que lorsque notre cœur a été déchiré et mis en lambeau par les passions, que nous nous adressons à lui. Aussi, serait-il vain de t’entretenir d’amour platonique. Mais, peut-être, me comprendras-tu, si je te dis que mon inclination pour toi n’a rien de terrestre ni de matériel, que c’est mon âme qui se sent attirée vers ta tienne.