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Page:Sacher-Masoch - La Czarine noire et autres contes sur la flagellation, 1907.djvu/191

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HEMELNIZKI LE COSAQUE

l’auberge où une sordide petite servante juive leur versait l’eau-de-vie empoisonnée, tandis que l’aubergiste paresseux, enveloppé d’une longue pelisse en renard, se tenait adossé au rond poêle en grès, et que sa belle jeune femme, assise au comptoir, vêtue d’une confortable jaquette doublée de peau d’Iltis, donnait le sein à un enfant et promenait son noir regard du plafond aux dalles recouvertes de nattes, et de celles-ci aux paysans frileux et tremblants, qui se frottaient activement les mains et frappaient leurs deux pieds alternativement contre le sol.

Le juif Chaim Pintchew et sa jeune femme pouvaient jeter un regard de dédain non seulement sur les paysans petits-russiens grelottants et affamés, mais sur le seigneur lui-même, dont l’aisance, voire la simple existence, dépendait d’une bonne récolte. Son bien-être à lui, Pintchew, reposait sur des assises solides ! Le juif possédait en fermage tout ce qui à Hemlin et dans les environs, pouvait être pris à ferme.

Le gouvernement polonais d’alors, le roi et tous ses fonctionnaires, woiwodes, starostes et castellans, semblaient n’avoir d’autre tâche que de mettre au pillage leurs propres nationaux et, en