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Page:Sacher-Masoch - La Femme séparée, 1881.djvu/26

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LA FEMME SÉPARÉE

— Certainement !

— Elle m’intéresse, cette dame, dis-je après une courte pause. Pouvez-vous me fournir des détails plus précis sur sa personne et sur son sort ?

Le vieux monsieur haussa les épaules :

— On sait peu de choses, presque rien sur son compte. Mais, croyez-moi, restez sur votre curiosité. Malheur à vous si vous tombez en son pouvoir ! Cette femme est beaucoup plus dangereuse qu’un vampire. Elle ne vous prendra pas seulement votre sang, elle vous prendra aussi votre âme. Ne vous aventurez pas dans son cercle magique, car vous pourriez bien vous trouver dans le cas d’une bête, — allons, je veux en chercher une convenable — dans le cas d’un ours qui passe sa vie à se ronger tristement les pattes, ou bien d’un chat noir. Et alors, soyez persuadé que le monde paraîtrait tout autre à vos yeux verts que vous le voyez maintenant à travers vos prunelles brunes.

Je me tus. Mais je me dis : L’avertissement vient trop tard. S’il est vrai qu’il y a dans ses yeux une puissance magique, je suis déjà en son pouvoir. Je me sentais attiré si irrésistiblement vers cette femme étrange, que je résolus de ne pas résister plus longtemps et de me laisser aller à mon sort. Comme tous mes essais pour me rapprocher de Mme de Kossow restèrent sans résultats, je pris la