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Page:Sacher-Masoch - La Femme séparée, 1881.djvu/56

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LA FEMME SÉPARÉE

Il leva les yeux, quitta sa place et me tendit les mains.

Je vis des traits connus et cependant j’hésitai.

— Ne me reconnaissez-vous pas ? dit en riant l’étudiant.

Je lui pris les mains et les portai à mes lèvres.

C’était Mme de Kossow.

— Que faites-vous ici, dans ce costume ?

Mme de Kossow, d’un gracieux mouvement, fit tomber son manteau et se redressa fièrement, les poings campés sur les hanches.

— Eh bien ! comment me trouvez-vous ? C’est ainsi que je cherche des aventures.

La classique beauté de son corps svelte se dessinait sous l’ampleur de son large pantalon russe, de sa blouse de drap serrée par une ceinture de cuir, et de ses hautes bottes de maroquin ; les boucles brunes de ses cheveux se déroulaient sur ses épaules, s’échappant du bonnet rond en astrakan qu’elle portait un peu sur le côté.

— Vous me voyez indignée ; mon sang bouillonne, continua-t-elle sans me laisser le temps de lui répondre. Lisez cette note… Là, qu’en pensez-vous ?

C’était la piquante annonce du mariage d’une actrice célèbre par sa beauté et ses aventures galantes avec un comte extrêmement riche.

— Ô société injuste ! s’écria Mme de Kossow.