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ISABELLE DE BAVIÈRE

Ce prince qui siégea sur le trône de notre patrie a trop d’affinité avec les affaires de la France, pour qu’on ne nous permette pas de le peindre sous les deux physionomies qu’il offrit à l’Europe.

Rien de hideux sans doute comme celle que présenta sa jeunesse. Fortement organisé, Henri avait reçu, par le seul effet de cette vigoureuse organisation, les penchants les plus vils et les plus à redouter ; mais les passions ressemblent à certaines plantes, qui sous le caractère le plus malfaisant, dérobent bien souvent de merveilleuses propriétés. Le jeune Henri volait sur les grands chemins, il y assassinait les passants, il insultait aux lois qui réprimaient le crime et protégeait celui qui le commettait. Les sots ne virent dans un tel caractère qu’un individu dangereux à la société ; le seul homme pénétrant dut y découvrir le germe de toutes les grandes qualités : où le peuple ne vit qu’un brigand, le sage observateur devina le héros ; il comprit que les modifications de cet être bizarre, dirigées de la perversité sur l’innocence, n’auraient bientôt plus que le caractère utile au bien de son peuple. La prédilection de Henri pour les complices de ses égarements peut s’expliquer par la protection qu’il accorda depuis à ceux qui chérirent les vertus qui firent oublier ses écarts : sa cruauté devait se changer en une justice sévère