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Page:Sade - Histoire secrète d’Isabelle de Bavière, reine de France, Pauvert, 1968.djvu/394

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ISABELLE DE BAVIÈRE


affreuse trahison, et que la perfide Isabelle consentait à déshonorer sa fille pour déshériter son fils.

Le soir du mariage, une de ses dames d’honneur eut la courageuse audace de hasarder quelques réflexions sur ce que venait de faire sa maîtresse. « Quand on n’a pas plus d’élévation que vous dans les sentiments, Madame, répondit Isabelle, on n’entend rien à ce qui constitue la fierté d’une reine. Le dauphin a fait assassiner le duc de Bourgogne, il a plongé le poignard dans mon cœur en perçant celui de ce prince ; je ne dois plus voir en lui que mon bourreau. Philippe de Bourgogne venge son père, quand le dauphin fait mourir sa mère : de ce moment, je dois à l’un vénération, service et amour ; ne pouvant étouffer l’autre comme fils ingrat et meurtrier, je le déshérite, je fais passer ses droits entre les mains de Henri… d’un prince rempli de vertus, de talents et pour le trône et pour la guerre. Je sers donc la nation française plus qu’on ne le croit en lui donnant pour la gouverner le plus grand homme de l’Europe au lieu d’un meurtrier, un héros au lieu d’un parricide et d’un lâche. »

Tels étaient les astucieux paradoxes dont cette marâtre étayait ses horreurs… Ô vertu, que ton ascendant est irrésistible puisque tu contrains même le vice à emprunter ton éclat qui le blesse !