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Page:Sade - La marquise de Gange, Pauvert, 1964.djvu/266

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LA MARQUISE DE GANGE

madame, non, je ne ferai que vous rappeler les anciennes… Je vous répète, Euphrasie, vous êtes coupable : tout ce que j’ai dit en votre faveur est l’ouvrage de ma tendresse pour vous, et non de la vérité. Le billet trouvé dans la poche de Villefranche est bien certainement de votre main ; je le possède encore ; il peut se reproduire au besoin. L’acte que vous signâtes chez Deschamps est une autre preuve de votre inconduite, suffisante pour vous perdre. Vous voyez cependant comme je me suis conduit. Je vous ai moi-même menée dans les bras de votre époux ; je me suis immolé pour vous ; je comptais sur votre reconnaissance ; mais vous êtes une ingrate : vous me préférez le chevalier ; vous avez cédé au duc de Caderousse ; vous vous couvrez à la fois de crimes et d’ingratitude. Je suis le seul envers qui vous affichez de faux dehors de sagesse, et vous ne voulez pas que je sois irrité ! Quelle inconséquence pourtant ! car nous savez que d’un mot je puis achever de vous perdre dans l’esprit de mon frère ; et ce mot, je le dirai, et ces preuves que je possède, je les produirai, soyez-en certaine, si vous persistez dans cette froideur, si dangereuse pour vous, et si hors de saison avec moi… Alors l’abbé, qui ne peut plus se contenir, se jette avec ardeur aux pieds de celle qu’il adore : il la conjure d’accorder au moins quelque chose à l’impétueuse passion qui le consume. Quel embarras pour la