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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/156

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ne serait pas des gages que je t’offrirais, ce serait la moitié de ce que je possède… Eh bien ! Justine, te sens-tu le courage d’accepter ce que je te propose ? la certitude de contribuer à d’aussi bonnes actions enflamme-t-elle tes nobles sentimens de vertu ? et pourrai-je enfin me flatter d’avoir découvert une amie ? Un verre de vin de Champagne fut avalé de part et d’autre avant que Justine ne prononçât, et cette liqueur enchanteresse, dont la propriété singulière détermine à-la-fois dans l’homme et tous les vices et toutes les vertus, dicta bientôt à la sage Justine de ne pas abandonner au malheur une femme aussi intéressante que celle que lui procurait la fortune. Oui, madame, dit-elle à sa nouvelle amie ; oui, comptez-y, je vous suivrai par-tout : ce sont des occasions de vertus que vous m’offrez ; quelles graces n’ai-je pas à rendre à l’Éternel, de ce qu’il me met à même d’exercer avec vous cette faculté si active de mon cœur ! qui sait, si à force de bons conseils, de patience, et d’excellens exemples, nous ne parviendrons pas à corriger votre mari ; les prières que nous adresserons au ciel seront si ardentes !… Ah ! flattons-nous de réussir un jour !… Et madame d’Esterval