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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/160

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pas, je lui substitue quelques servantes, ou les jeunes et jolis objets que le hasard nous fait rencontrer. S’ils n’arrivent pas, madame d’Esterval va me les chercher… C’est une excellente créature, Justine, que cette femme-là ; douée des mêmes goûts et des mêmes fantaisies que moi, elle aide mes opérations, et nous en recueillons tour-à-tour les fruits. — Quoi ! dit Justine, avec une surprise mêlée de douleur ; quoi ! madame d’Esterval m’a trompée ! — Oui certes, si elle s’est montrée vertueuse ; car il est sans doute difficile de voir une femme plus corrompue ; mais il fallait vous séduire : la fraude et l’imposture étaient nécessaires. Vous servirez donc en ces lieux les plaisirs de ma femme et les miens, et… Ah ! voici mon ange, voici ce qui va vous faire frémir : vous serez la Circé des voyageurs qui passent ici ; vous les amadouerez, les enchaînerez, vous les servirez, vous flatterez toutes leurs passions pour rendre leur défaite plus sûre… afin que nous les égorgions plus facilement après. — Et vous vous êtes flatté, monsieur, que je resterais dans cette infernale maison ? — J’ai plus fait, Justine, je vous ai dit qu’après que vous seriez instruite, il vous deviendrait difficile de fuir, et que vous resteriez ici de plein