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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/66

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je vous prie. — Je le voudrais, madame, répondis-je en faisant enlever l’or et la petite fille par Clémentia, vêtue en duegne, et que j’avais amenée comme ma sœur ; oui, je desirerais de tout mon cœur pouvoir entièrement dissiper vos craintes ; mais le puis-je, sans vous tromper ! Vous devez, je le sens, compter sur la miséricorde de Dieu ; mais votre réparation peut-elle égaler l’offense ? cette réparation, qui ne porte que sur le tort que vous avez fait aux hommes, appaisera-t-elle un Dieu irrité ? Quand on réfléchit à la grandeur, à l’immensité de cet Être-Suprême, peut-on se flatter de l’adoucir, une fois qu’on a eu le malheur de l’offenser ? Connaissez le caractère de ce Dieu terrible dans l’histoire de son peuple ; voyez-le par-tout, jaloux, vindicatif, implacable ; et ces différens modes, qui seraient des vices dans l’homme, ne devenir que des vertus dans lui. Et en effet, perpétuellement outragé par ses créatures, sans cesse envié par le démon, comment, sans une étonnante sévérité, parviendrait-il à manifester son pouvoir ! La marque distinctive de l’autorité est nécessairement la rigueur ; la tolérance est la vertu du faible. Toujours le despotisme indiqua la puissance : on a beau