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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 4, 1797.djvu/172

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comblée des présens… des amitiés de madame Delisle, et dirige ses pas du côté de Vienne décidée à vendre ce qu’il lui restait, pour arriver à Grenoble, où ses pressentimens ne cessaient de lui dire qu’elle devait trouver le bonheur. Nous allons voir comment elle y réussit, après avoir préalablement raconté les nouvelles traverses qui l’attendaient, avant que de parvenir à cette capitale du Dauphiné.

Justine marchait tristement, toujours dirigée vers la ville de Vienne, lorsqu’elle apperçoit, dans un champ à droite du chemin, deux cavaliers qui foulaient un homme aux pieds de leurs chevaux, et qui, après l’avoir laissé comme mort, se sauvèrent à bride abatue. Ce spectacle affreux l’attendrit jusqu’aux larmes : Hélas ! dit-elle, voilà un homme plus à plaindre que moi ; il me reste au moins la santé et la force ; je puis gagner ma vie ; et, si ce malheureux n’est pas riche, que va-t-il devenir en l’état où ces fripons viennent de le mettre ?

À quelque point que Justine eût dû se défendre des mouvemens de la commisération, quelque funeste qu’il eût été de tous les tems pour elle de s’y livrer, elle ne put vaincre l’extrême desir qu’elle éprouvait de se rappro-