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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 4, 1797.djvu/204

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une jouissance, détaché de cette jouissance, il peut donc en donner lui-même ; il y aura donc alors une jouissance certaine dans le crime seul. Car, il est impossible que ce qui prête du sel n’en soit pas très-pourvu soi-même. Ainsi, je le suppose, le rapt d’une fille, pour son propre compte, donnera un plaisir très-vif ; mais le rapt, pour le compte d’un autre, donnera tout le plaisir dont la jouissance de cette fille se trouvait améliorée par le rapt : le vol d’une montre, d’une bourse, etc. en donnera également ; et, si j’ai accoutumé mes sens à se trouver émus au rapt d’une fille, en tant que rapt, ce même plaisir, cette même volupté, se retrouvera au rapt de la montre, à celui de la bourse, etc. Et voilà ce qui explique la fantaisie de tant d’honnêtes gens qui volent sans en avoir besoin. Rien de plus simple de ce moment-là, et que l’on goûte les plus grands plaisirs à tout ce qui sera criminel, et que l’on rende, par tout ce que l’on pourra imaginer, les jouissances simples, aussi criminelles qu’il sera possible de les rendre : on ne fait, en se conduisant ainsi, que prêter à cette jouissance la dose de sel qui lui manquait, et qui devenait indispensable à la perfection du bonheur. Ces systêmes mènent loin,