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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 4, 1797.djvu/318

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routes dangereuses de la vertu. N’es-tu donc pas suffisamment punie de ta sagesse et de tes faux principes ? quelles infortunes te faut-il donc pour te corriger ? quels exemples te sont nécessaires pour te convaincre que le parti que tu prends est le plus mauvais de tous, et qu’ainsi que je te l’ai dit cent fois, on ne doit s’attendre qu’à des revers, quand, prenant la foule à rebours, on veut être seule vertueuse dans une société tout-à-fait corrompue. Tu comptes sur un Dieu vengeur ! détrompes-toi, Justine ; détrompes-toi ; le Dieu que tu te forges n’est qu’une chimère dont la sotte existence ne se trouva jamais que dans la tête des fous. C’est un phantôme inventé par la scélératesse des hommes, qui n’a pour but que de les tromper ou de les armer les uns contre les autres. Le plus important service qu’on eût pu leur rendre, eût été d’égorger sur-le-champ le premier imposteur qui s’avisa de leur parler d’un Dieu ; que de sang un seul meurtre eût épargné dans l’univers ! Va, va, Justine, la nature, toujours agissante, toujours active, n’a nullement besoin d’un maître pour la diriger. Eh ! si ce maître existait effectivement, après tous les défauts dont il a rempli ses œuvres, mériterait-il autre chose de nous