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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 4, 1797.djvu/324

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avez dans votre voiture une malheureuse qui mit hier le feu à la principale auberge de Villefranche ; puis, se mettant à toiser Justine, voilà son signalement, madame, nous ne nous trompons pas, ayez la bonté de nous la livrer et de nous apprendre comment une personne aussi respectable que vous paraissez l’être a pu se charger d’une telle femme ?

Rien que de simple à cet évènement, répondit l’adroite créature, et je ne prétends ni vous le cacher ni prendre le parti de cette fille, du moment qu’elle est coupable du crime affreux dont vous parlez : je logeais comme elle hier à cette auberge de Villefranche ; j’en partis au milieu du trouble ; et comme je montais dans ma voiture, cette fille s’élança vers moi, en implorant ma compassion, en me disant qu’elle venait de tout perdre dans cet incendie, qu’elle me suppliait de la prendre jusqu’à Lyon où elle espérait de se placer ; écoutant moins ma raison que mon cœur, j’acquiesçai à ses demandes : une fois dans ma chaise, elle s’offrit à me servir. Imprudemment encore je consentis à tout, et je la menais en Dauphiné où sont mes biens et ma famille ; assurément, c’est une leçon : je reconnais bien à-présent tous les inconveniens de la