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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 4, 1797.djvu/343

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de M. de Cardoville ; songez à profiter comme il convient de la faveur que le ciel vous offre ; nous en avons beaucoup ici qui desireraient une telle grace, et qui ne l’obtiendront jamais.

Parée du mieux qu’il lui est possible, Justine suit le concierge, qui la remet aux mains de deux grands nègres, dont le farouche aspect excite sa frayeur. On la jette dans une voiture, sans dire un mot ; les nègres y montent avec elle ; les stores se baissent ; et le seul calcul que puisse faire Justine, est que c’est à deux ou trois lieues de Lyon que la voiture s’arrête.

La cour d’un château solitaire, environnée de cyprès, est le seul objet que lui laissent appercevoir les rayons de la lune ; aucun bruit ne se fait entendre, et l’on conduit notre héroïne dans une salle assez mal éclairée, où les nègres, toujours en silence, l’entourent, sans lui dire un mot. Au bout d’un quart-d’heure, une vieille femme, suivie de quatre jeunes garçons, très-jolis, âgés de seize à dix-huit ans, et tenant chacun le coin d’un grand drap noir, paraissent aux yeux de Justine.

Parvenue au dernier terme de votre vie, lui dit la vieille, les vêtemens que vous portez vous deviennent inutiles ; quittez-les donc tous