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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 7, 1797.djvu/289

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que d’établir (et sur-tout à mes yeux) le bonheur de l’homme, sur la nécessité de la vertu ! D’où venaient donc tous mes malheurs, si ce n’était de ma faiblesse à l’avoir un instant écoutée ; je vous demande ensuite, si l’induction captieuse que Lorsange tirait de son systême, pouvait éblouir même un instant que qu’un d’aussi ferme que moi. Si la vertu devenait nécessaire, disait-il, la religion l’était également ; d’où il résultait, qu’entassant des mensonges sur des préjugés, toutes les maximes de mon instituteur s’écroulaient, aussitôt qu’on fouillait les bases. Eh ! non, non, me dis-je, la vertu n’est point nécessaire, elle n’est que nuisible et dangereuse : n’en ai-je pas fait la fatale expérience ? et toutes les fables religieuses qu’on veut étayer sur elles, ne peuvent avoir, comme elle, que l’absurdité pour principes ; l’égoïsme est la seule loi de la nature ; or, la vertu contrarie l’égoïsme, puisqu’elle consiste en un sacrifice perpétuel de ses penchans, au bonheur des autres : si la vertu prouve Dieu, comme l’établit Lorsange, qu’est-ce donc que le Dieu qu’on échafaude sur la plus grande ennemie de la nature ? Oh ! Lorsange, tout votre édifice s’écroule