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Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 3, 1799.djvu/20

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Rodrigue ? Tu vois sous mon emblême le plus mortel de tes ennemis, répond le lion ; tu m’as persécuté dans le monde, et je te rends service dans les enfers… Rodrigue, si tu parviens à conserver tes états, souviens-toi qu’un souverain n’est digne de l’être, que quand il rend heureux tout ce qui l’entoure ; c’est pour soulager les hommes, et non pas pour les faire servir d’instrumens à ses vices, que le ciel les élève au-dessus des autres ; reçois cette leçon de bienfaisance d’un des animaux de la terre que l’on croit le plus féroce ; sache qu’il l’est bien moins que toi, puisque la faim, le plus impérieux des besoins, est la seule cause de ses cruautés, tandis que les tiennes ne te furent inspirées que par les plus exécrables passions. Prince des animaux, dit Rodrigue, tes maximes plaisent à mon esprit, mais elles ne conviennent point à mon cœur ; je suis né pour être le jouet de ces passions que tu me reproches, elles sont plus fortes que moi… elles m’entraînent ; je ne puis vaincre la nature. — Tu périras donc. — C’est le sort