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Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 3, 1799.djvu/203

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coute que ce que je te dirai, et regarde moi comme la plus vile des créatures, si jamais d’autre homme que toi reçoit ou ma main ou mon cœur. Herman est dans un état violent, courbé à terre, il baise les pieds de celle qu’il idolâtre, on eut dit qu’au moyen de ces baisers ardens, son âme qui les imprimait, son âme entière dans ces baisers de feu eût voulu captiver Ernestine… Je ne te verrai plus… je ne te verrai plus, lui disait-il au milieu des sanglots… Mon père, laissez-moi vous suivre, ne souffrez pas qu’on m’enlève Ernestine, ou si le sort m’y condamne, hélas ! plongez moi votre épée dans le sein ; le colonel calmait son ami, il lui engageait sa parole de ne jamais contraindre les intentions de sa fille ; mais rien ne rassure l’amour alarmé, peu d’amans se quittaient dans d’aussi cruelles circonstances, Herman le sentait trop bien, et son cœur se fendait malgré lui ; il faut enfin partir ; Ernestine accablée de sa douleur… les yeux inondés de larmes, s’élance à côté de son père, dans une