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Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 3, 1799.djvu/70

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connaissons-nous le bonheur, qu’on se plaît à nous séparer ! Hélas ! qui sait si le sort nous sera toujours favorable ?… il vous a déjà préservé, j’en conviens, mais vous comblera-t-il toujours de ses dons ? Ah ! Strozzi, Strozzi, je ne sais, mille affreux pressentimens que je n’éprouvais pas à notre première séparation, viennent m’alarmer aujourd’hui, j’entrevois des malheurs prêts à fondre sur nous, sans qu’il me soit possible de discerner la main qui doit s’appesantir… Antonio, m’aimeras-tu toujours ?… songe que tu dois bien plus maintenant à l’épouse, que tu ne devais jadis à l’amante… Que de titres t’enchaînent à moi… — Qui les sent mieux que ton époux, Laurence, multiplie les sans cesse à mes yeux tous ces droits enchanteurs, et mon âme encore plus exigeante t’en découvrira de nouveaux. — Mais Strozzi, pourquoi nous quitter cette fois ; ce qui ne se pouvait l’an passé, n’a plus aujourd’hui nul obstacle, ne suis-je pas ton épouse ? quelque chose au monde peut-il m’empêcher d’être auprès de toi ? —