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Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t2, 1878.djvu/353

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LIVRE DEUXIÈME.

fut autant excitée que contrariée par les Provinciales. Mais en 1664, l’archevêque Péréfixe s’y prêtant, elle put atteindre aux extrêmes rigueurs. De 1664 à 1668, il y a véritablement captivité.

En 1668, à force de négociations, et sous un nouveau Pape, la Paix de l’Église répare tout. On a dix années environ de calme, durant lesquelles Port-Royal jouit d’un vif et suprême éclat, jusqu’à ce qu’en 1679 une autre persécution recommence, qui doit être la dernière, mais celle-ci plus sourde et plus lente, et qui a tous les caractères d’un blocus. Elle ne dure pas moins de trente ans, sans discontinuation, sans espoir, et finit par l’entière ruine. — Cela dit, on peut suivre M. de Saci aux différents temps.

Il n’avait pas quitté le désert avant 1661 ; mais, à ce moment, les ordres de dispersion furent tels qu’il dut lui-même se dérober. Sa vie, si ennemie des changements, en souffrit beaucoup. Caché avec trois ou quatre amis dans quelque maison de faubourg, à peine y avait-il été un peu de temps qu’il fallait songer à un gîte plus sur. On était épié ; chaque sortie pouvait le faire découvrir. M. de Saci, dans sa charité sacerdotale, ne se refusait pourtant à aucune visite vers les amis qui le réclamaient. Ce fut surtout après la mort de M. Singlin, survenue en ces tristes années (17 avril 1664), que tout le poids des directions retomba sur lui. L’hôtel de Longueville en particulier l’obligeait à de fréquents voyages à travers Paris. Vers la fin, pour plus de prudence, il s’était logé dans un quartier perdu, tout à l’extrémité du faubourg Saint-Antoine, avec Fontaine seulement et M. Du Fossé. C’est là qu’on le découvrit.[1] Depuis plu-

  1. On a dit que la retraite de M. de Saci avait été découverte d’abord et dénoncée par les espions que mettait bénévolement en campagne le fameux Des Maretz de Saint-Sorlin, poète et fanatique, qui faisait là un plus méchant métier encore que quand il écrivait