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Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t3, 1878.djvu/586

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PORT-ROYAL.

des Enfants. Retiré et employé pendant un temps au Collège des Grassins, dont le Principal était son ami, il retourna passer à Beauvais les dernières années de sa vieillesse. Tel qui le vit un jour, pouvait dire qu’il l’avait vu tous les jours de sa vie. Cette uniformité et régularité dans le silence fait la marque distinctive de la pure race selon Saint-Cyran. Une fièvre lente arrêta tout à la fin ce doux vieillard qui cheminait à petits pas (1704). M. Coustel avait 83 ans.

On a les noms de beaucoup d’élèves de Port-Royal. Du Fossé dans ses Mémoires s’est plu à nous parler de ses condisciples les plus chers, le jeune marquis d’Abain, M. de Fresle, M. de Villeneuve, tous trois enlevés dès leur première campagne, et qui débutaient dans le rude métier sous l’œil des Turenne et des Fabert[1]. Il y avait

  1. De nouveaux documents sont venus s’ajouter à ce qu’on savait déjà de M. de Villeneuve, ce plus jeune fils de M. d’Andilly. On en doit la connaissance à M. Varin, dans le livre qu’il a publié sous le titre : La Vérité sur les Arnauld (tome II, pages 184 et suiv.). C’est la première fois que j’ai l’occasion de citer ce livre, et j’éprouve, je l’avoue, un certain embarras. L’estime que j’ai pour M. Varin, et l’amitié qu’il m’a toujours témoignée, ne sauraient m’empêcher de laisser percer mon sentiment. Dans cet ouvrage, les pièces inédites sont intéressantes, la partie érudite et bibliographique est d’une recberche curieuse et exacte ; mais je ne saurais accueillir ni les jugements de l’auteur, ni le procédé d’interprétation qu’il a partout appliqué. Et tout d’abord, quand il veut bien faire mention de moi avec indulgence, comme ayant déjà contribué avant lui à enlever quelques rayons à l’auréole qui entoure le nom vénéré des Arnauld, il m’accorde un éloge auquel je n’ai véritablement aucun droit. Je n’ai jamais eu le dessein de découronner les illustres Arnauld, mais bien plutôt de m’honorer en les étudiant, et en les expliquant à des générations qui ont pu les perdre de vue à distance. Si j’ai marqué en eux quelques traits de l’humaine faiblesse, ç’a été par amour de la vérité, et sans entendre leur faire injure. Pour revenir au jeune M. de Villeneuve, M. Varin croit trouver dans les pièces qu’il publie des preuves qui feraient presque de M. d’Andilly le bourreau et l’assassin de son