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Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t3, 1878.djvu/631

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APPENDICE.

note, sur la prononciation, M. R. ne la signerait sans doute pas aujourd’hui ; il sait que la chose n’est ni si sûre ni si simple qu’il a pu le penser il y a vingt ans. Les observations du milieu sont très-justes. Elles peuvent se résumer en ces trois points :
« 1° Lancelot tient trop peu compte de l’usage, qui doit dominer tout dans un ouvrage didactique élémentaire ; des mots rares et presque introuvables sont mis par lui en ligne à côté des plus communs, et, qui pis est, quelques-uns ne sont autres que des mots forgés par les grammairiens pour les besoins de leurs idées sur l’étymologie ;
« 2° Il y a chez lui mélange continuel des mots poétiques et des mots ordinaires, d’où il résulte que les thèmes des élèves qui savent le mieux leur Jardin sont les plus comiques ;
« 3° On peut relever fréquemment l’insuffisance ou même la fausseté des significations, fausseté soit matérielle, soit dans l’ordre qu’il suit, quand il y a plusieurs sens. C’est la rime qui fait ce mal.
« Somme toute, la lecture (si justement et si vivement recommandée par Port-Royal) et nos bons dictionnaires rendent complètement inutile ce livre « ostrogoth. » L’ordre alphabétique y est un véritable contre-sens. Les mots simples ou racines y devraient être classés suivant leur fréquence dans l’usage. J’ai calculé que six à sept cents mots simples bien choisis, expliqués dans une douzaine de leçons avec exercices sur la composition et la dérivation, et bien appris, mettraient les jeunes gens à même de lire couramment tous les écrivains ordinaires. (Les dizains de Lancelot en renferment environ 3000.) Un plan que je proposais à ce sujet fut applaudi dans la Commission des livres classiques et recommandé par M. le président au ministre M. Rouland, puis le silence se fit… »


SUR LE PÈRE LABBE.

(Se rapporte à la page 528.)

Pour bien juger du Père Labbe et de son esprit, de cette activité légère et fanfaronne qui lui fit entreprendre tant de choses dont la plupart (telles que les grandes collections) ne sont bonnes et utiles qu’en tant qu’il n’y a pas mis du sien, il n’est pas hors de propos de lire le récit d’une conférence qui fut tenue à Paris, au mois d’août 1652, entre lui et le célèbre professeur en Sorbonne, le docteur de Sainte-Beuve. Ce fut un vrai duel théologique en champ clos. On a de cette conférence deux relations, l’une contenue dans une lettre de M. de Sainte-Beuve lui-même et qui se peut lire à la page 278 et suiv. du Journal de M. de Saint-Amour ; l’autre, qui se trouve dans les Mémoires manuscrits de M. Feydeau. Je donnerai cette dernière comme moins aisée à connaître :