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Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t3, 1878.djvu/78

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PORT-ROYAL.

et de plus jeune en façon et en usage ; de ces années où MM. de La Rochefoucauld et de Retz avaient tout à l’heure quarante ans, et où il en avait trente[1].

La troisième Lettre Provinciale, datée du 9 février, commença à paraître le 12, avec un éclat et un applaudissement supérieur à ce qu’on avait vu des deux premières. « Ce succès, dit M. de Saint-Gilles, choqua de plus en plus les adversaires, qui faisoient mettre des mouchards(c’est son expression) à toutes les imprimeries : ce qui augmenta beaucoup les frais de l’impression. »

Cette Lettre porte tout entière sur la condamnation définitive d’Arnauld, qu’on avait achevé de voter le 29 janvier[2]. C’est un bulletin ironique et léger de la conclusion. Un passage au début nous prouverait, si nous l’ignorions, combien le Jansénisme que les gens du monde ne connaissent guère que d’après Pascal et ne commencent qu’à lui, était déjà vieux pour lui[3]: « Ressouvenez-vous, je vous en prie, des étranges impressions qu’on nous donne depuis si longtemps des Jansénistes. Rappelez dans votre mémoire les cabales, les factions, les erreurs, les schismes, les attentats qu’on leur reproche depuis si longtemps, de quelle sorte on

  1. Cependant si le billet à une dame est de mademoiselle de Scudéry, le billet de l’académicien pourrait bien être de quelque Gomberville, ou tout simplement de l’illustre Chapelain ; le style est assez lourd et assez empesé pour cela (voir l’Appendice à la fin du volume). La malice de Pascal consisterait alors à s’en être servi et à en avoir fait montre, prenant pour soi l’éloge et laissant les gens de goût apercevoir d’eux-mêmes la différence des styles qui sautait aux yeux.
  2. Il se tint encore une séance le 31, pour quelque formalité d’ensemble. Il avait suffi en tout de cinq séances depuis la retraite des amis d’Arnauld.
  3. On appelle volontiers le Jansénisme du nom de Pascal, comme la peinture grecque du nom d’Apelles : c’est le grand éclat, et le commencement de la fin.