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Page:Sainte-Beuve - Portraits littéraires, t1, nouv. éd.djvu/361

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l’Académie des Sciences pour remplacer M. Bossut. Nommé secrétaire du Bureau consultatif des Arts et Manufactures (mars 1806), il suivait assidûment les travaux de ce comité, et ne devint secrétaire honoraire que lorsqu’il eût donné sa démission en faveur de M. Thénard, dont la position alors était moins établie que la sienne. Il fut de plus successivement nommé inspecteur général de l’Université (1808), et professeur d’analyse et de mécanique à l’École polytechnique (1809), où il n’avait été jusque-là qu’à titre de répétiteur, professant par intérim. En un mot, sa vie de savant s’étendait sur toutes les bases.

Dans l’histoire des sciences physico-mathématiques, comme va le faire connaître M. Littré, la mémoire de M. Ampère est à jamais sauvée de l’oubli, à cause de sa grande découverte sur l’électro-magnétisme en 1820. Dans l’histoire de la philosophie, pourquoi faut-il que ce grand esprit, qui s’est occupé de métaphysique pendant plus de trente ans, ne doive vraisemblablement laisser qu’une vague trace ? M. Maine de Biran lui-même, le métaphysicien profond près de qui il se place, n’a laissé qu’un témoignage imparfait de sa pensée dans son ancien traité de l’Habitude et dans le récent volume publié par M. Cousin[1]. Après M. de Tracy, à côté de M. de Biran, M. Ampère venait pourtant à merveille pour réparer une lacune. M. Cousin a remarqué que ce qui manque à la philosophie de M. de Biran, où la volonté réhabilitée joue le principal rôle, c’est l’admission de l’intelligence, de la raison, distincte comme faculté, avec tout son cortége d’idées générales, de conceptions. Nul plus que M. Ampère n’était propre à introduire dans le point de vue, qu’il admettait, de M. de Biran, cette partie essentielle qui l’agrandissait. Lui en effet, si l’on considère sa tournure métaphysique, il n’était pas, comme M. de Biran, la volonté même, dans sa persistance et son unité

  1. M. Naville, de Genève, dépositaire des manuscrits de Maine de Biran, en a publié, depuis, des portions considérables.