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Page:Sand - Contes d une grand mere 1.djvu/56

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— Fais-moi donc voir ! reprit le docteur en mettant ses lunettes. Eh bien, c’est très-joli, cela ! c’est un antique.

— C’est-à-dire une chose qui n’est pas à la mode d’à présent ? Maman Laure dit que tout ce qui est antique est très-vilain.

— Moi, je pense le contraire, c’est le nouveau que je trouve laid.

M. Flochardet entra en ce moment. Il avait fini une séance de portrait, et, avant d’en commencer une autre, il venait serrer la main du docteur et lui demander comment il trouvait la petite. Je la trouve bien, répondit M. Féron, et plus raisonnable que vous, car elle admire ce petit fragment de la statuaire antique et je gage que vous ne l’admirez pas.

Après s’être fait expliquer comment cet objet se trouvait dans les mains de Diane, Flochardet le regarda avec indifférence et dit en le rejetant sur la table :

— Ce n’est pas plus mal fait qu’autre chose de ce temps-là, si toutefois c’est un antique. Je n’en saurais juger comme vous qui avez la manie de ces restes et qui croyez pouvoir prononcer. Je ne nie pas votre savoir et votre érudition, cher docteur ; mais de pareils débris sont si usés, si informes, que vous les voyez souvent avec les yeux de la foi. J’avoue qu’il me serait impossible d’en faire autant, et que tous ces prétendus chefs-d’œuvre de l’art grec ou romain me font l’effet des poupées de Diane quand elles ont le nez cassé et les joues éraillées.

— Profane, dit le docteur en colère, vous osez